Les films en costumes ne sont pas tous ampoulés, poussiéreux et destinés à un public de niche, ils peuvent même faire preuve d’une grande modernité comme en témoigne cette agréable surprise que figure « L’échange des princesses ». Marc Dugain entend nous conter une période charnière de l’Histoire de France en narrant les intrigues de pouvoir de la Cour durant quelques années charnières où des enfants royaux sont échangés entre nations pour la paix. Et la bonne idée du film est de nous faire assister à cela à hauteur d’enfant. Et les quatre enfants ou adolescents qui interprètent ces figures royales sont pour beaucoup dans la réussite du film. Kacey Mottet Klein, Anamaria Vartolomei, Igor van Dessel et Andréa Férreol sont tout autant un carré d’as prodigieux que des révélations promptes à figurer dans la sélection des Espoirs aux prochains Césars. Attachants, justes, malicieux et dignes, ils incarnent ces figures de la royauté poussées trop jeunes dans les arcanes du pouvoir à la perfection.
Si l’on est un peu perdu au départ dans la chronologie et les noms de l’Histoire française du XVIIème siècle, « L’échange des princesses » résume cela de manière assez efficace pour que l’on ne s’y perde pas. De toute manière, le sujet du film est ailleurs. Dans la description de ces us et coutumes, aujourd’hui archaïques, qui prévalaient à l’époque. Un peu comme l’immense « Gosford Park » de Robert Altman qui détaillait tous ceux de la bourgeoisie anglaise du XXème siècle, on prend le temps ici de se pencher sur des traditions ayant trait à cette époque. De la plus drôle (le cabinet de toilettes mobile pour les repas) à la plus ridicule (l’armada de laquais pour le moindre déplacement d’un membre de la famille royale). Et c’est tout à fait bien rendu avec un sens de la reconstitution au poil. Costumiers et décorateurs ont œuvré avec passion sur ce long-métrage et cela se ressent dans les moindres détails et donne un poids certain à cette reconstitution.
Dans un film comme celui-ci où rôde continuellement le spectre de la mort, on est agréablement étonné de voir autant d’énergie, baignée dans une réalisation mobile et paradoxalement très vivante. Mais on aime aussi ressentir les passions qui se nouent et se jouent au sein de la Cour de France et de celle d’Espagne par lettres (et donc séquences) interposées. L’amour naissant d’une princesse pour celui à qui on l’a promis de force émeut tout comme on est attendri par les interrogations d’une princesse miniature à savoir si son roi de mari, encore adolescent, ressent de l’amour pour elle. C’est, en outre, brillamment dialogué et le long-métrage de Marc Duguain ne pâtit d’aucune longueur. On s’instruit avec plaisir devant ces palabres royales en se disant que le sort de l’Europe ne tenait qu’à des intrigues de boudoir dignes d’une sitcom. Cette distanciation et ce décalage amusent durablement. On sort de la projection avec l’impression d’avoir appris quelque chose tout en ayant passé un beau et bon moment de cinéma avec une œuvre qui a fière allure et belle parure.