Même si l'on échappe jamais complètement à l'engourdissement devant un film d'Antonioni, le malaise-là qui se développe au coeur de "l'éclipse" est unique et sans égal. Il suffit de voir la manière dont Antonioni nous révèle progressivement, au cours du film, un monde des objets - un monde nouveau et étrange - qui, de plus en plus, prend le pas sur celui des vivants, et entre en concurrence avec les personnages : Antonioni a définitivement quitté ici le cinéma dramatique, sentimental et psychologique, pour partir à la recherche d'un nouveau cinéma distancié affectivement, plus froid ou paradoxal, mais aussi souvent magnifiquement radical. [Critique écrite en 1996]