J'en attendais pas grand chose. Je l'ai vu à l'arrache au réveil, il était proposé par un débutant dans une édition échange du FFSC. Et pourtant, j'ai vécu une expérience extraordinairement forte. Une ode, un plaidoyer pour l'éducation, l'émancipation, et un somptueux voyage politique et pédagogique dans une France de 1920 en quête de modernité.
Le vif du sujet : la crédibilité au coeur de tout
Le scénario est parfaitement écrit, c'est simple, mais terriblement efficace. Il est au service d'une galerie de personnages bigarrés qui respirent tous ce pays profond de l'entre deux guerres. Du maire de Salèzes, caricatural joueur de Pétanque, à l'aristocrate technophile De Saint-Saviol en passant par l'antiquaire escroc réactionnaire notoire ou l'étonnant coiffeur progressiste M. Pourpre et les élèves touchants et bien joués, ils sont tous délicieux et parfaitement intégrés. C'est un immense plaisir de les suivre dans ce village provençal surement caricatural, chantant et et un brin désuet, mais diablement crédible !
Chacun d'entre eux s'inscrit dans cette période ambivalente, entre tradition et nouveauté. Les plus conservateurs s'opposent aux méthodes modernes de cet enseignant normalien interprété par un Blier magistral. Il remplace, dans un village de Provence, un vieux maître obsédé par la discipline et les châtiments corporels qui n'obtient pas de résultat très probants avec ses élèves. Armé de la méthode Freinet, il transforme tout, motive les élèves, et chamboule la vie du village.
Techniquement, c'est très réussi aussi, la musique souligne parfaitement le feeling du film, c'est enjoué, dynamique, très agréable a suivre. Le rythme est parfaitement calé, souvent rapide et vif, mais néanmoins posé il est le parfait vecteur des émotions que le réalisateur souhaite transmettre. Il souligne merveilleusement les différentes ambiances, parfois drôles, parfois dures, et souvent inspirantes.
Quelle dernière partie !
Le troisième acte du film avec cette fronde contre M. Pascal est une autre des grandes réussites du film. La tension autour du certificat d'études d'Albert est extrêmement bien mise en scène, le retournement progressif de la classes des filles aussi. La plaidoirie autour des droits humains, qui se comprend d'autant plus lorsque l'on place le film dans son époque, est excellente. Les lignes de fractures qui parcourent le village autour du sort de leur enseignant participent elles aussi, a la très réussie dramaturgie de ce final. Que dire enfin de cette chanson qui conclut une touche romantique bienvenue qui ancre le film, encore un peu plus, dans une réalité émotionnelle palpable !
Aussi le message sur l'émancipation par l'apprentissage me touche beaucoup et la méthode Freinet fait partie des préceptes qui m'inspirent. Je crois en tout ce que j'ai vu ce matin, c'est un très très bon film, intelligent, et qui porte un discours profondément politique. J'irais même plus loin, je pense que c'est l'un de mes films préférés parmis ceux que j'ai vu ces 3-4 dernières années.