Quel huit clos infernal !
Nous sommes en effet dans un moment très particulier d'un couple : le moment où il se sépare, alors qu'il vit encore ensemble, avec ses enfants : des jumelles de 8 ans.
Nous ne quitterons guère cette maison, navigant de pièce en pièce où les relations se jouent, tel un ballet de rapports de forces, de discussions incessantes pour se partager l'appartement, d'hésitations, de moments de disputes violentes, d’intenses instants de communion familiale, rares et donc chers.
Il est intéressant de voir comment les endroit stratégiques de la maison, tels que le lit, la table de jardin, les canapés du salon, la table de la cuisine sont occupés successivement par le père, la mère et les filles, ensemble ou séparés, mais rarement à quatre.
Les jumelles sont pleines de vie, charmantes. Elle sont capricieuses de temps en temps, mais sans plus, comme sont les enfants de leur âge. On les admire tour à tour gaies ou renfrognées, toujours complices.
J'aime comme les parents s'occupent d'elles, restant complices, affectueux, très à leur écoute, tentant de leur expliquer l’inexplicable : cette séparation qui traîne, cette cohabitation compliquée entraînant de nombreuses disputes entre leurs parents. On dirait que c'est le cap à tenir pour les parents : continuer à élever les filles dans le respect et l'Amour, malgré les vicissitudes, comme la chose essentielle à sauvegarder.
Le père, interprété par le charmant Cédric Kahn, se bat comme une mouche au fond d'un verre. Il se bat pour défendre ses droits sur ses filles, sur l’appartement où il a fait beaucoup de travaux. Parfois, il dépasse les limites, entraînant la fureur de sa femme.
La mère, jouée par la si troublante Bérénice Béjo, souhaite se protéger, marquer son territoire, en établissant des règles peu être pas assez discutées, trop unilatérales, qui ne conviennent pas au père de ses filles. On la sent troublée, très perturbée, mais forte malgré tout.
La belle-mère sème la zizanie, avec une position ambiguë qui complique encore plus les choses.
Tout est transition, et comme tout le monde le sait, les transitions sont difficiles à vivre. Le couple se tourne autour, se fuit, se cherche, hésite. Jusqu'où Marie acceptera -elle d'aller, après ces baisers qu'elle a partagés avec Boris, au goût du passé ?
In fine, ce film pose une question assez simple, universelle : celle de la séparation. Comment peut on se séparer de son conjoint, du parent de ses enfants, de celui qu'on a chéri, avec qui on a tant partagé, mais qui nous insupporte aujourd’hui ?
La délicatesse de la mise en scène, la richesse des dialogues, ce rapport fin à l'intime apporte ce cachet en plus et donne tout son intérêt au film.
Se dessine alors un conflit de génération très intéressant, entre Marie et sa mère. Sa mère est de l'ancienne génération, celle qui supportait de rester, pour les enfants, même si le désir était parti. Marie, elle, ne peut pas vivre dans ce qu'elle appelle le mensonge. Elle ne peut pas transiger là-dessus. Elle ne peut pas vivre avec quelqu'un sans le désirer. Pour elle, la relation avec Boris est finie.
Cédric Kahn devrait faire l'acteur plus souvent car il est vraiment remarquable.
Quant à Bérénice Béjo, elle est toujours au somment, Qu'elle continue à choisir minutieusement ses films, comme celui-là, là où elle peut rayonner tout en délicatesse et pleine de force.
Joachim Lafosse, réalisateur prometteur, nous régale une fois de plus.
Note attribuée : 7.5/10