Après un remarquable Martin Eden, L'envol, inspiré d'un roman russe publié en 1923, confirme le goût de Pietro Marcello pour les adaptations littéraires et son excellence en la matière. Dureté et féérie cohabitent dans ce film situé dans l'après guerre de 14-18, jusqu'aux années 30, qui a des allures de conte avec ses sortilèges et ses malédictions, où le réalisme se fait parfois musical ou magique. Contrairement à ce que son titre suggère, le long-métrage ne s'envole pas vraiment mais reste à une belle altitude pendant toute sa durée, proposant une très tendre relation père/fille, seuls ou presque face à l'hostilité d'un village. Avec une maîtrise parfaite des ellipses temporelles et un sens du cadre affirmé, Pietro Marcello parvient à rester cohérent dans sa narration et à nous attacher à ses personnages principaux, tout en recréant avec talent la rudesse d'une époque dans la région picarde. Il n'y a rien à redire à l'interprétation des comédiens les plus connus, soit Noémie Lvovsky et Louis Garrel, mais ce sont bien Raphaël Thiéry et Juliette Jouan qui donnent le plus dans L'envol, la dernière, en particulier, qui démontre, dès son premier rôle d'importance dans un long-métrage, un naturel et un charme confondants. Issue d'une famille d'artistes, professionnels ou amateurs, cette jeune caennaise est plu qu'une promesse pour le cinéma français.