L'Esprit s'amuse
6.1
L'Esprit s'amuse

Film de David Lean (1945)

Troisième et avant-dernière collaboration entre David Lean et Noël Coward, « L’Esprit s’amuse » possède plusieurs caractéristiques communes avec « Heureux Mortels », tourné un an auparavant et où nous constations notamment l’effacement de Lean au profit du texte et de l’esprit de Coward, avec à la clé une œuvre honorable, à défaut d’être mémorable. Pourtant, s’il est à nouveau évident que Lean ne réalise pas ici son plus grand film et que celui-ci vaut une fois de plus avant tout pour la qualité de la pièce d’origine, le résultat n’en est pas moins réjouissant. Coward semble s’être fait plaisir en nous proposant une intrigue originale et souvent surprenante, pimentée de dialogues savoureux au possible. Cette histoire d’épouse défunte obligeant par sa présence son ex-époux remarié à un ménage à trois ne manque pas de sel, d’autant que l’auteur n’hésite pas à mettre le doigt sur des sujets encore assez tabous à l’époque, surtout en Angleterre. Sexe et adultère sont ainsi évoqués à plusieurs reprises frontalement, mais sans jamais tomber un seul instant dans le vulgaire ou le scabreux.


Il n’est toutefois pas question d’être dans l’hilarité permanente, et d’ailleurs nous sourions beaucoup plus que nous nous esclaffons. Mais c’est aussi ce qui fait le charme du film : un parfait équilibre, sans temps mort, avec un rythme mené à grand train (on songe à Feydeau parfois), notamment grâce à la relation assez complexe qu’entretient le héros avec sa femme défunte. Très loin de la douceur et de l’élégance qui caractérise habituellement ce type de personnages, Elvira, le fantôme sensuel, s’avère tantôt agaçante et vulgaire, tantôt touchante et émouvante. Le fait que celle-ci soit verte ne fait qu’accentuer cette étrangeté, ce décalage amusé qu’incarne à l’écran avec un plaisir communicatif la belle Kay Hammond. L’interprétation est d’ailleurs globalement satisfaisante : car si Rex Harrison est malheureusement moins inspiré qu’à l’accoutumée, on ne pourra que se réjouir de la prestation de la magnifique Constance Cummings, mais surtout du tourbillon Margaret Rutherford, comme toujours géniale, dans un rôle de voyante vraiment pas comme les autres. Au final, si l’on regrettera un Technicolor vraiment très moyen, « L’Esprit s’amuse » n’en reste pas moins un petit festin, mélange saisissant de comédie et de fantastique (à noter d’ailleurs des trucages du plus bel effet) pour un résultat typiquement anglais, parfaitement enivrant.

Caine78
7
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le 4 avr. 2018

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Caine78

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