Wim Wenders prend son temps pour nous parler du Cinéma comme d'un Artisanat en voie de disparition, où l'attente dérisoire et l'inactivité complaisante finissent par nourrir des images spectrales, au risque de nous perdre un peu... Puis "L'Etat des Choses" subit une formidable accélération, l'un de ces décollages d'autant plus scotchants qu'ils sont inattendus, et nous laisse éblouis, enchantés devant tant d'audace et d'excellence. En chemin, Wenders aura capturé les tensions, l'ennui et le chaos inhérents à la construction d'un film, mais il aura posé plusieurs questions essentielles qui travaillent les auteurs actuels (le cinéma ne peut-il se nourrir que d'histoires ? Jusqu'où dans la confusion entre réalité et illusion ?), et il aura surtout rendu un peu plus visible encore le fantôme qui hante désormais le Cinéma, celui de son ultime fragilité.
[Critique écrite en 1983]