Très louables sont les ambitions de David Perrault dans L'état sauvage, qui dès son deuxième long-métrage n'hésite pas à se mettre en danger en se colletant à un genre ultra référencé et codifié, le western. Jacques Audiard s'est aussi attaqué à ce type de montagne et a plutôt convaincu avec une tonalité originale alors que Perrault a voulu réinventer le genre en lui donnant une couleur européenne, plus précisément italienne puisque les réalisateurs qu'il cite volontiers sont Mario Bava et Luchino Visconti. On peut aussi penser à Kelly Reichardt pour la volonté de donner plus d'importance au sensoriel qu'au narratif pur. Mais, c'est là ou cela coince un peu dans ce conte de Perrault : le réalisme de certaines séquences se marie mal avec l'aspect contemplatif de l'ensemble, marqué parfois par des afféteries esthétiques pas loin d'être ridicules (ah, ces ralentis !). Tout n'est pas mauvais, loin de là, dans cette histoire d'une famille française rattrapée par la guerre de Sécession et contrainte de fuir le Missouri. Non, il y a de bonnes choses, un côté fantasmatique, par exemple, et deux beaux portraits de femmes qui se ressemblent, l'une dans la bonté et l'autre dans la haine. Mais hélas, il y a quelques scènes maladroites (le passage au-dessus de la falaise) et surtout des dialogues d'une très grande pauvreté. L'interprétation est de même assez inégale malgré une Alice Isaaz de plus en plus convaincante dans son jeu. En définitive, hormis pour ceux qui ne supportent pas quelques langueurs, L'état sauvage témoigne de partis pris qui rendent la réalisation sympathique et prometteuse pour la suite, même s'il reste à Perrault beaucoup de progrès à faire pour donner pleinement satisfaction.

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le 26 févr. 2020

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