Fais comme moi, fais semblant
J'ai ri quand l'attachée de presse de Diaphana, le distributeur, a présenté L'Exercice de l'Etat comme une "proposition de cinéma". Elle avait pourtant raison. Le film n'accomplit pas le seul exploit de montrer la pratique du pouvoir là où La Conquête avait échoué, il stimule et pousse à la réflexion.
La réussite de ce film tient au paradoxe sur lequel il repose : dans un environnement très réaliste - le quotidien de Bertrand Saint-Jean, ministre des Transports entre travail sur le terrain, nombreuses discussions avec sa conseillère en communication dans sa voiture et réunions tardives avec les membres de son cabinet - il contient pourtant un rapport à la réalité biaisé, interrogé par une fonction fondée sur la représentation, et ce, sur plusieurs niveaux.
-Le monde politique apparaît comme une bulle où les hommes qui le régissent sont loin de réaliser ce que vit la plèbe, même s'il leur arrive d'engager un emploi-jeune. Ce cocon, pour autant violent qu'il soit, les maintient à l'écart de leur vie de famille, mais aussi des amitiés gratuites. Donnez une soirée libre au ministre et il ne saura qui appeler. Au service de l'Etat, ils sont aussi dévorés par lui.
-La position de pouvoir de Bertrand Saint-Jean n'est qu'illusoire. Opposé au projet de privatisation des gares, il devra faire bonne figure lorsque son gouvernement s'y soumet.
-Certaines scènes, quasi-mystiques, ponctuent le récit. Est-ce là une façon de montrer que Bertrand Saint-Jean prend conscience de sa position vaine, de ce jeu de dupes ?
Il arrive au ministre de se frotter à la vie réelle, à la faveur d'une soirée chez son chauffeur qui vit dans une maison en construction, ou lorsqu'un événement tel qu'un accident de voiture prend le dessus sur la fonction professionnelle.
En tire-t-il quelque chose, une leçon, une quelconque émotion ? Non. Si ce n'est une promotion.
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