Frank Borzage choisit avec ce film d'évoquer la société d'avant puis d'après-guerre, la même qui évoluera ensuite avec les Années Folles. Par le prisme de la condition sociale désavantageuse, terrible d'une jeune femme dont la sœur prend plaisir à faire souffrir, et délaissée par sa famille, le film pose la grande question de la foi à cette période précise de l'histoire (fin des années 1910s) . Était-il si important de garder espoir d'être heureux un jour, pour se retrouver ainsi que ces proches ?


Bien sûr, la réponse est affirmative, et le cinéaste met en scène le paradoxe d'une religion que l'on transmet peu à la société, où ceux dans le plus grand besoin de la foi ne reçoivent aucune aide. On l'aura compris, la plus grande religion est celle de l'amour, celle qui portera le regard d'une femme vers le ciel, et la ramènera physiquement ou pas, vers celui qu'elle aime.


Hypocrisie sociale, dont le personnage de Charles Farrell est concerné en début de film (se complaisant à être l'homme que l'on admire, sauvant la "bête"), prendra conscience au fur et à mesure de ce que le bon dieu signifie. Rien n'aura donc plus de valeur que de prendre celle qu'il aime dans ses bras, l'apercevoir une dernière fois figée dans la chambre, contrastant avec le métier qui le rémunérait, consistant à relayer et observer la circulation.


Société imprévisible, à l'aube d'un départ en guerre sur le point de commencer, que Borzage prend soin de mettre en scène, entre les plans d'ensemble couvrant la ville comme le montage très précis, avec départ d'armées, femmes recluses dans les chambres, et obus se dirigeant vers les véhicules. Janet Gaynor émeut comme jamais, et il découle de son regard une émotion de tristesse comme de bonheur, en l'absence d'une personne en particulier.


L'armistice pour une solution pacifique durable ; l'amour pour le bonheur éternel, au paradis retrouvé. Un des piliers de l'âge d'or du cinéma muet.

William-Carlier
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le 19 nov. 2021

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William Carlier

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