Après le déjà très impressionnant Camille, portrait d'une jeune journaliste partie couvrir le conflit en Centrafrique, le réalisateur Boris Lojkine réalise un nouveau coup de force avec cette histoire de jeune Guinéen sans papier, qui survit tant bien que mal en livrant des repas tout en préparant l'entretien qui lui permettrait d'obtenir un titre de séjour.


Un film qui pourrait être la deuxième partie de celui de Matteo Garrone, Moi, Capitaine, sorti en début d'année. Deux faces d'une même pièce pour raconter l'histoire de ceux qui quittent tout et risquent leur vie dans l'espoir d'un futur meilleur.


La mise en scène, mais aussi l'écriture, au cordeau, parviennent à maintenir une tension du début à la fin. L'on retient son souffle à chaque étape du périple de ce jeune exilé, qui s'apparente à un véritable parcours du combattant. Le film ne se disperse jamais et avec son approche immersive et quasi documentaire, c'est comme si nous pédalions avec lui à travers les rues de Paris.


Un regard plein d'empathie mais aussi sans concession sur notre société uberisée, qui nous renvoie à notre propre responsabilité en tant que consommateurs et qui, après un final suspendu particulièrement réussi, nous laissent seuls avec à notre conscience (sans pour autant être moralisateur), nous qui sommes tous complices de cette invisibilisation.


Abou Sangare, lui-même sans papier et casté via une association, bouleverse par l'authenticité de son jeu et la résilience de son personnage. La longue scène d'entretien finale, durant laquelle la talentueuse Nina Meurisse lui donne parfaitement la réplique, est magistrale.


Avec ses deux prix tant mérités à Cannes, dans la section Un Certain Regard (prix du jury + prix d'interprétation masculine), L'Histoire de Souleymane est l'un des films les plus bouleversants de l'année, une oeuvre importante, presque d'utilité publique, qui devrait être montrée à tous les français, en ces temps politiques agités où la parole haineuse et le rejet de l'autre sont de plus en plus décomplexés.


Ma page ciné instagram : fenetre_sur_salle

Fenetre_sur_salle
9

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Ciné 2024

Créée

le 11 oct. 2024

Critique lue 34 fois

1 j'aime

Critique lue 34 fois

1

D'autres avis sur L'Histoire de Souleymane

L'Histoire de Souleymane
EricDebarnot
9

Qu'est-ce qu'un GRAND film ?

Pourquoi vais-je au cinéma ? Pour me divertir ? Sans doute, mais les films les plus divertissants que j'ai vus, je les ai pour la plus part oubliés au bout de quelques semaines, voire jours. Non, je...

le 16 oct. 2024

35 j'aime

10

L'Histoire de Souleymane
takeshi29
7

Souleymane et une bicyclette à deux (Delive)roues...

Le cinéma est une histoire de point de vue et de distance, et c'est particulièrement vrai avec ces "films à sujet" dont on regrette souvent qu'ils n'aient pas plutôt donné lieu à des documentaires...

le 23 sept. 2024

33 j'aime

2

L'Histoire de Souleymane
Naldra
5

Boris Lojkine m'a saoulé

Je n'avais pas particulièrement envie de voir ce film. Le sujet ne m'intéressait pas spécialement. J'y suis donc allé en traînant un peu des pieds, surtout que j'avais été relativement déçu par mes...

le 9 oct. 2024

28 j'aime

22

Du même critique

Moi capitaine
Fenetre_sur_salle
8

Moi si j'étais un homme...

Un film coup de poing qui tient en haleine de bout en bout en suivant deux jeunes sénégalais qui décident de fuir leur pays pour rejoindre l'Europe.Dans notre imaginaire d'occidentaux, le périple...

le 9 janv. 2024

25 j'aime

How to Have Sex
Fenetre_sur_salle
5

Critique de How to Have Sex par Fenetre_sur_salle

Lauréat du prix Un Certain Regard au dernier Festival de Cannes, How to have sex est un film très attendu en cette fin d'année, mais le bilan est plutôt mitigé.L'on retiendra principalement...

le 16 nov. 2023

14 j'aime

2

Une famille
Fenetre_sur_salle
9

Critique de Une famille par Fenetre_sur_salle

Quelle claque.Autant prévenir que cette note aura une part subjective encore plus importante que d'habitude tant Christine Angot est un écrivain que je suis et qui me fascine depuis de très...

le 17 mars 2024

13 j'aime

1