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L’Histoire de Souleymane, c’est celle des individus bringuebalés par les aléas d’une vie subie et parachutés dans une société ultra-libérale qui à défaut de les accueillir dignement les transforme en esclaves modernes en leur faisant tinter l’espoir d’une potentielle assimilation future. Un film social donc, ancré dans un réalisme qui aura tôt fait de faire relativiser le plus borné des spectateurs.
La musique est absente, la temporalité étouffante, le paysage sonore parisien agressif, les plans resserrés. Tout concurre à un état d’urgence permanent, à une tonalité de thriller urbain, qui est en parfait adéquation avec l’activité de livreur exercée par le réfugié guinéen. Souleymane passe de galère en galère, mais garde son espoir, et donc sa positivité. Pas de quête menant vers une haine de ce qui l’entoure et le malmène, plutôt des doutes quant à la possibilité de s’en sortir.
Il faudra bien un bon et un sourire d’une restauratrice immigrée elle aussi, l’intérêt d’un client marginalisé par son âge pour sa personne, l’oreille attentive d’un copain du centre d’accueil, ou un café offert par un tenancier compatissant, pour que l’homme puisse tenir. Ces moments de répit, d’humanisme, sont d’autant plus réconfortants qu’ils sont rares, que ces élans de solidarité ne font que percer timidement le voile opaque de l’indifférence, voire du dédain.
Toute cette pression éclate dans un final déchirant et attendu, alors que la véritable histoire de Souleymane prend le dessus sur le discours répété. Et cela fonctionne. Grâce à tout le dispositif filmique mené jusqu’alors. Grâce à la puissance de l’interprétation de Abou Sangaré, acteur amateur au parcours malheureusement bien trop proche de celui de son personnage, et de l'officière de l'OFPRA campée par Nina Meurisse qui vient abattre les barrières érigées, contreproductives. Grâce à l’absence d’une résolution close qui aurait contrevenu à l’ambition réaliste du projet. Une conclusion en état de grâce donc.