Je ne sais pas pourquoi, mais au générique de fin, ce film m'a fait penser à cette chanson :
« Rame, rame, rameurs, ramez,
On avance à rien dans c'canoë
Là-haut, on t'mène en bateau
Tu pourras jamais tout quitter, t'en aller
Tais-toi et rame. »
Signé Alain Souchon.
Tout comme le rameur d'Alain Souchon, l'histoire de Souleyman, de Boris Lojkine, ne cesse de pédaler vers cet idéal qui semble chaque jour un plus loin.
Son canoë à lui, c'est son vélo qui n'avance pas, prisonnier d'un système oppressif et impitoyable.
Dieu l'observe depuis son ciel lointain. Une chance, quand l'espérance dans la nuit devient désespoir.
Pourtant Souleyman veut y croire, offrir la paix à sa mère, qu'il espère enfin atteindre.
Mais son rêve le fatigue, tout comme ces mots qu'il ne sait pas retenir.
Pourquoi est-il venu en France ? Le rêve semble illusoire. La lutte, bien trop dure.
Tous ces papiers, ces identités qu'il emprunte, celles des autres, lorsque le temps passe et que son rendez-vous ultime approche.
Souleyman ne pourra jamais tout quitter : son passé, ses souffrances. Ici ou ailleurs, elles le rattrapent où qu'il soit.
Le désespoir quand l'épuisement le guette, et qu'il n'est plus nécessaire de mentir pour espérer atteindre le rivage. Fatigué de cette vie, ses larmes de honte et de sincérité le trahissent. Abou Sangaré, dans le rôle de Souleyman, est remarquable de vérité. Boris Lojkine a su filmer ce périple de manière saisissante.
Poignant témoignage de l'exil, non seulement géographique, mais aussi intérieur.