Scénario :
Le film début avec un carton disant qu'il n'y a pas de scénario.
C'est un mensonge.
Ce film fait partie de mon "rattrapage culturel : la liste alternative"
En tant que sujet d'étude :
Le film était dans la liste parce qu'il s'agit d'un classique du cinéma expérimental : Dziga Vertov y développe sa théorie du Kino Pravda, le ciné-oeil ou cinéma-vérité. En gros, c'est un cinéma qui décide de représenter la réalité en utilisant les effets offert par la technologie pour en saisi la vérité. Le film est cité de temps en temps comme étant l'un des plus célèbre exemple du genre. (Je me souviens avoir lu un camarade YouTuber (Ali de Superfocale) dire sur Twitter "je peux aussi bien aimer l'Homme à la caméra que des films de divertissements.")
Dès le départ, je trouve que Vertov nous ment en disant que son film s'est affranchie de la contrainte du scénario vu que son film repose lui aussi sur une trame scénaristique assez claire : il s'agit de suivre la journée de ses concitoyens russes. Les premières séquences commencent sur la ville qui s'éveille mise en parallèle avec une femme qui se réveille, puis vient les premiers remue-ménage, le coeur du film nous montre. Le tout est encadré de séquence sur le film lui-même par une forme de mise en abyme : le film s'ouvre sur une salle de cinéma que l'on installe, on voit des plans montrant tantôt Vertov en train de filmer tantôt sa monteuse (l'occasion pour moi de voir comment se montait à l'époque) et le film se termine par des plans de spectateurs en train de regarder L'homme à la caméra. (Et très enthousiaste, ce qui fait que le film s'auto-congratule lui-même.)
On a l'impression que Vertov veut tester toutes les possibilité qu'il a sa disposition, que ça soit en tant que caméraman (il y a des plans séquences, des plongées et des contre-plongée, des plans embarqués, des panoramas, des plans sous des trains dont j'ai encore du mal à savoir comment ils ont été tournés etc... ) ou en tant que monteur (superposition de plans, ralenti, stop motion, incrustation, etc...) On a droit à un film très riche et très condensé.
Mon avis personnel :
Quand on a allumé le film, on s'est dit : "bon, on va pas se taper une heure de film muet et expérimental. On le coupe en petit morceau ?" Et on a pas décrochés du film pendant la petite heure qu'il a défilé.
A vrai dire, moi qui ai vu quelques films expérimental, c'est rare d'en voir des aussi divertissant. Passer de films italiens longuets et austères à ça, c'est un peu le grand écart. Vertov s'amuse incroyablement, il n'arrête pas d'enchainer les plans, les effets de montages, les séquences, ça virevolte, ça bouge, au point que le film est presque à la limite épileptique dans ses dernières minutes.
Il y a une vie et un fourmillement dans ce film que j'ai rarement vu ailleurs. Et c'est pour ça qu'il m'a autant plus : le film est à la fois une démonstration de force et une trace de la façon dont les russes vivaient à la fin des années 20. Malgré la pensée fugace que la quasi-totalité des gens que je voyais à l'écran étaient morts (sauf peut-être l'enfant que l'on voit littéralement naître devant nous et qui doit avoir 90 ans maintenant) j'ai été pris par l'impression de vie et de foisonnement du film.
Et puis ça m'otera l'excuse pourrie du "ok, ce film est lent mais il est vieux, à l'époque on filmait comme ça." Vertov me dit que c'est des conneries, me rappelle que le montage est une musique et qu'une bonne symphonie est intemporelle.
Vertov s'amuse et ça m'amuse aussi. Je crois que j'aime beaucoup.