L'Homme à la peau de serpent par Alligator
Nov 2009:
Le noeud du film reste cette confrontation animale entre deux monstres sacrés que se paye Sidney Lumet. Deux lions encagés dans un texte parfois d'une très grande finesse de Tennessee Williams, se tournent autour, se regardent, se reniflent dans une grande parade amoureuse à la sexualité sur certains points un peu trop grossièrement affichée. Je n'ai pas pu m'empêcher de rire aux éclats par exemeple en entendant Brando évoquer la chaleur de son corps au moment où il se caresse le torse devant Magnani. On frôle le ridicule également sur la fin quand la nature théâtrale, originelle du récit emporte le film sur les rives marécageuses du mélodrame plein de pathos qui colle. La Magnani est alors beaucoup moins convaincante quand elle laisse éclater son aigreur, sa colère retenue jusqu'ici avec une gravité et une peine hors du commun. Je n'ai pas du tout été convaincu non plus par Brando face au juge au tout début du film. C'est une expérience très déconcertante pour moi, il faut le voir pour le croire : première fois que je vois Brando jouer. D'habitude, il est si naturel qu'on en oublie l'acteur qui bosse. Que dire alors de la poussive prestation de Woodward en ado attardée, dans sa rebellion futile et égocentrique, avec des accents de fausseté bien difficiles à entendre.
Par contre, la rencontre entre Brando et Magnani tient toutes ses promesses, lumineuse. Le film entre alors dans un monde à part. La parade commence et le duo qui se forme, se développe et déploie des trésors de sensualité, de sensibilité. Une bonne moitié du film, son beau milieu, est vraiment un spectacle très riche, en émotion, en intelligence (belles écriture et mise en scène) un petit bijou enchassé dans un écrin un peu grossier (début et fin du film).
Dommage. La réalisation de Lumet est intéressante, plutôt bonne. Le bât blesse plus sur l'adaptation scénaristique et la direction des comédiens.