Pourquoi L'HOMME AU PISTOLET D'OR est un film raté ?

Parce que, déjà, ça commence très mal. Dans des décors pop en carton-pâte qui paraissent tout droit sortis de CHAPEAU MELON & BOTTES DE CUIR période psychédélique de 1966-68, avec Roger Moore qui joue le rôle de sa propre statue en cire (qui bouge trop). On attend presque de voir surgir John Steed ou Tara King d'un coin de l'image. Une fois terminée la séquence d'ouverture qui laisse tout de même un brin perplexe, les premières mesures du générique tonnent et effraient. Y a pas d'autre mot. C'est pas beau. C'est immonde. Ça fait soit peur, soit rigoler. Une guitare électrique sursaturée joue n'importe quelle note pendant que Lulu gueule (comme d'hab') par dessus. Les autres instruments font n'importe quoi aussi, mais pas en même temps. On dirait qu'ils ne jouent pas tous le même morceau. C'est peut-être du free-jazz du coup ? tellement y en a pas deux qui sont ensemble.

Bref ! Une fois le massacre auditif terminé, L'Homme au pistolet d'or peut véritablement commencer. Et pour tout dire, ça se regarde. Une intrigue se met en place. Sans génie et sans grandes envolées, certes, mais ça prend forme petit à petit et on se laisse porter. On rencontre des personnages mystérieux (Andrea Anders) et d'autres, plus conventionnels (Lieutenant Hip, Mary Goodnight) et charismatiques (Scaramanga, Nick Nack) dans des décors enfin inventifs pour la première fois depuis 1969 (l'épave du Queen Elizabeth en baie de Honk Kong).

Mais voilà, Guy Hamilton et ses copains se croient spirituels, très drôles et inventifs. Ainsi, à l'issue d'une rencontre de Bond avec Haï Fat, l'agent secret est fait prisonnier dans une école de karaté. Et à partir de là, ça part en quenouille.

En 1974, Bruce Lee est à la mode, alors ils mettent 007 en kimono et lui font faire un combat débile (le principe - rigolo, il faut bien l'admettre - sera repris par Spielberg dans Les Aventuriers de l'Arche perdue en remplaçant le karatéka par un manieur de sabre vindicatif), puis ça castagne dans tous les sens. On nous refourgue ensuite la poursuite en bateau de Vivre et laisser mourir dans une version bangkokoise qui va se prolonger en voiture avec le sheriff J.W. Pepper qui était en vacances dans le coin avec sa femme. Si c'est pas du pur génie ça !

Après, c'est encore mieux : Bond et son copain Pepper font un looping en voiture rouge mais n'arrivent pas à temps pour rattraper Scaramanga qui s'enfuit avec Nick Nack et Goodnight enfermée dans le coffre de voiture ...qui se transforme en avion et s'envole, à l'instar de la DS de Fantômas en 1965 (mais cette fois la voiture est moche). Apparemment, Guy Hamilton apprécie le cinéma d'auteur français. Bel hommage. Merci pour lui.

On passera sur les moments qui tournent au vaudeville grotesque dans la chambre d'hôtel et dont Mary Goodnight fait encore les frais, comme c'est le cas depuis sa première apparition dans le film. Le personnage de Britt Ekland incarne d'ailleurs la parfaite caricature de la potiche blonde hollywoodienne tendance "Soit belle et tais-toi". Encore un élément à porter au crédit de ce chef-d’œuvre.

Et puis le film s'achève comme il avait commencé, dans le décor acidulé de CHAPEAU MELON & BOTTES DE CUIR et sans le moindre suspense ; tout étant déjà prévisible vu qu'on connaissait déjà l'endroit (encore un bel exemple de mauvaise réalisation). Et on se retape la bouse auditive.

Il y avait pourtant de quoi faire avec ce qu'on nous avait proposé dans la première moitié du film et une très belle distribution (Christopher Lee, Maud Adams, Hervé Villechaize). Mais Guy Hamilton a craqué son slip au milieu et on a l'impression d'avoir changé de chaîne en cours de route. C'est donc un beau ratage. Un très mauvais cru.


Muffinman
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le 28 nov. 2024

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