Second western d’Anthony Mann que je découvre, après le surprenant et l’excellent Winchester 73 il y a quelques jours, L'Homme de la plaine – à ne pas confondre avec L’Homme des hautes plaines, de et avec Clint Eastwood : deux salles, deux ambiances – vient clore une collaboration de 5 westerns entre le réalisateur Mann et l’acteur James Stewart.


Le cycle avait débuté en 1950 avec Winchester 73, puis avaient suivis Les Affameurs, L'Appât, Je suis un aventurier, et donc enfin L’Homme de la plaine, en 1955.
Les deux hommes devaient se retrouver également pour Le Survivant des monts lointains, mais Anthony Mann déclina en 1957 l’invitation du studio, qui confia la réalisation à James Neilson. Mann raconte que James Stewart lui en a toujours un peu voulu de cette décision.


Ecran Large, via son dossier sur Les 20 meilleurs westerns, avait été jusque-là d’excellent conseil. C’est grâce à cet article que j’ai notamment découvert Johnny Guitare et Winchester 73, deux films qui sont rentrés dans le cercle de mes westerns préférés.
En revanche, je suis un peu moins convaincu par la présence de cet Homme de la plaine dans le top 20. Evidemment toute liste est éminemment subjective, et il y a autant de classements de westerns que d’aficionados du genre. Mais il manque ici pour moi le petit grain de folie ou le je-ne-sais-quoi qui fait passer un bon film au rang de chef d’œuvre ou de vraie pépite.
Attention, loin de moi l’idée de dire que L’Homme de la plaine est un mauvais film ! Mais sans doute qu’avec cette recommandation, j’en attendais un petit peu plus.


Le cowboy solitaire de cette aventure se nomme Will Lockhart, un homme taciturne et parfois colérique, et qui vit du transport de marchandises d’une ville à l’autre. Lors d’une livraison dans une petite ville située en bordure de territoire Apache, nommée Coronado, il fait la douce rencontre de la jeune et belle Barbara Waggoman (incarnée par Cathy O'Donnell), mais aussi celle plus musclée de son cousin Dave Waggoman (Alex Nicol), fils à papa brutal et sans cervelle, et futur héritier du principal ranch de la région.


Progressivement, les enjeux se mettent en place : d’un côté il apparaît clair que notre héros Will Lockhart (un excellent rôle de James Stewart) n’a pas posé ses valises dans ce bled paumé complètement par hasard – la thématique de la vengeance personnelle, l’un des principaux moteurs des intrigues de westerns, se dessine progressivement – ; de l’autre la mécanique d’un film d’enquête se met progressivement en place, avec des morts inexpliquées et l’identité mystérieuse d’un trafiquant d’armes.


Je remarque au passage une forme de fascination d’Anthony Mann pour les armes de l’Ouest : Winchester 73 était déjà centré sur cette fameuse Rolls Royce des carabines ; et l’un des enjeux principaux de L’Homme de la plaine est également l’arrivée imminente d’une cargaison de fusils à répétition qui ne doit pas tomber entre les mains des Indiens.


Le scénario est bien ficelé, plus touffu et élaboré - et c'est un bon point - que la grande majorité des westerns : le background de chaque personnage est travaillé avec soin, et leurs trajectoires se croisent et s’imbriquent avec subtilité.


A la différence du magnifique 4/3 de Winchester 73, Anthony Mann opte ici pour le CinémaScope, format d'excellence pour filmer les grands espaces de l’Ouest (le film est tourné au Nouveau Mexique). Ce sera d'ailleurs le seul western du cycle Mann-Stewart dans ce format.


L'Homme de la plaine est un western désenchanté, parfois mélancolique, et d’une sourde violence. A mille lieux des personnages peu causant mais à la gâchette précise des films d’Eastwood ou de Sergio Leone, ici James Stewart n’incarne pas le cowboy viril et tout-puissant, mais un homme torturé et complexe.
Avec ses sublimes paysages, sa bande sonore soignée (magnifique thème de The man from Laramie) et sa mise en scène qui râpe, on n’est pas encore devant un western crépusculaire, mais un de ceux qui entame un certain déclin.

D-Styx
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le 10 mars 2021

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D. Styx

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