Critique à chaud du cheval de bataille et magnifique film de Terry Gilliam.
Avant de commencer la séance, ma plus grande crainte résidait dans le casting final du projet. Le duo Depp/ Rochefort vendait vraiment du rêve, sur le papier. Pourtant, il a suffi de quelques instants pour effacer ces tenaces fantômes de ma mémoire. Jonathan Pryce est royal, aussi grandiose que pitoyable, aussi drôle que touchant, aussi grandiloquent que magnifiquement paumé. Il incarne à merveille l'archétype de héros errant / clochard céleste cher à Gilliam. Face à lui, Adam Driver est impeccable, dans son tumultueux chemin de croix, balloté entre ses idéaux perdus, ses fantasmes, ses rêves et ses déceptions.
On retrouve les ingrédients qui ont composé les meilleurs films de l'ex-Monty Python, ses cadrages barrés, ses contre-plongées épiques, son univers de barnum déjanté et de ruines graphiques. Si le film n'est pas exempt de défauts, et passe un moment dans la caricature, c'est pour mieux servir son propos, entre farce cruelle et adaptation libre du livre de Cervantes.
Dans un monde cynique, où peuvent se réfugier les rêveurs, à part peut-être dans une sorte de folie (plus ou moins) douce ?
Ce Don Quichotte version Gilliam est barré, étourdissant, baroque, foutraque, sensible.
Vingt cinq ans de sa vie à se battre contre moulins à vents, géants cousus d'or et autres cataclysmes plus ou moins naturels... au final, cela donne un bon film. Et c'est sans doute l'aspect le plus enthousiasmant de toute cette picaresque histoire !