L'Homme Qui Voulut Etre Roi c'est d'abord le rêve de deux hommes, de conquérir une contrée inconnue à eux seuls et une caisse de fusil. A l'époque où l'Europe à fait main basse sur le monde, où deux empires coloniaux ont conquit en quelques années plus des trois quarts de l'Afrique, le rêve de ses deux ambitieux n'est peut être pas si fou que ça. Et puis les deux bonhommes ont un illustre prédécesseur, Alexandre de son petit nom, surnommé le Grand. Le parallèle avec cet homme qui voulut être un dieu (parce que roi il l'était déjà mais c'était pas assez) parait assez évident.
Mais revenons au point de départ, l'Inde coloniale de la fin du 19e siècle. Deux soldats de sa majesté désertent fièrement l'armée britannique, direction le nord et ses montagnes. Pour atteindre une terre qui reste encore à conquérir il faut aller très loin, au delà des cols enneigés de l'Himalaya. Une très rude expédition qui laissera nos deux héros presque mort, et un atteint de la cécité des neiges. John Huston plante le décor, ce n'est pas aux confins du monde connu qu'il nous emmène, ce sont les confins du monde tout cours. Et nous voici arriver dans la province fictive du Kâfiristân, comme si on avait franchi le seuil de la réalité pour entrer dans l'univers du rêve, ce rêve de devenir roi, rien à deux et une caisse de fusil.
Et ça marche pour les deux bonhommes, bien aidés par un ancien soldat des troupes coloniales qui peut leur faire la traduction, et par des circonstances favorables qui les feront apparaitre comme des dieux aux yeux des autochtones. Ce à quoi, bien entendu, il vont finir par croire eux mêmes, en particulier le personnage de Sean Connery. Il est là notre nouvel Alexandre, imbu de sa personne, annoncé depuis des siècles comme celui qui mettra enfin de l'ordre dans ce pays de barbare. Lui et sa Roxanne, la belle indigène qu'il prendra comme épouse contre l'avis de son peuple.
Après ça les destins d'Alexandre et de notre binôme de conquérant diffèrent quelque peu, mais le résultat reste le même. Un royaume rapidement construit disparait aussi rapidement. Le film de Huston, adapté n'une nouvelle de Kipling, est un beau conte philosophique mettant en lumière la vacuité de nos rêves. Tout en étant une épopée fascinante de bout en bout, mise en scène dans un décor somptueux digne d'un Lawrence d'Arabie ou du meilleurs des westerns. Servi par un des plus fantastique binôme de l'histoire du cinéma : Connery-Caine. Un film marquant à découvrir le plus tôt possible, et à revoir aussi souvent que la raison le permet.