L'Île aux fleurs par Devotchkaia
Je viens de voir L'île aux fleurs, m'attendant au mieux au vu des commentaires et des notes incroyablement unilatérale. Je me dis qu’il doit y avoir là quelque chose de marquant ou de profond pour se retrouver dans le top 111 et n’avoir qu’une dizaine de note en dessous de la moyenne… Et puis : non. J’entends ou je lis que trouver ce film naïf est la marque d’une morale profondément corrompue. Soit. Idolâtrer un produit cinématographique tel que celui-ci parce que son message met en avant la pauvreté (dont nous sommes, derrière nous écrans, a priori bien protégés) alors même que celui-ci est plein de désinformation, et représente une arnaque argumentative des plus maitrisées, voilà le vrai paradoxe. Produit de consommation dénonçant la consommation et se plaçant dans une logique consumériste qui veut que la valeur ajoutée de la consommation importe plus que le bénéfice que la consommation apportera en elle-même.
Ce film se veut informatif : les seules informations apportées par l’ïle aux fleurs sont pourtant bien pauvres et parfois même assez fausses, mais répétées en boucle sur un ton relativement plat, elles donnent l’impression de ces cours magistraux qui se veulent pédagogique mais qui ne sont que remplissages (pour des profs qui veulent un salaire mérité).
Ce film se veut neutre, donnant des informations « telles qu’elles sont », et laissant au spectateur le soin de recomposer de lui-même le puzzle. Les informations données sont faussées, le regard biaisé, faux et manipulateur. La monnaie, l’argent ou le commerce n’ont pas été « inventé ». L’inlassable répétition du mot « échange » lui-même relié à l’argent constitue le premier fil de cette arnaque argumentative : l’échange et l’argent seraient les responsables d’une société dans laquelle les inégalités existent.
Ce film veut parler de la « société de consommation » ou du libéralisme moderne, mais passe complètement à côté de ce qui caractérise les différences entre nos sociétés « libres » et les sociétés anciennes dites « oppressives ». Mettant sur le dos de la « société de consommation » (argument repris en chœur, comme on s’y attend, par la majorité des spectateurs) l’existence même de l’inégalité, on en vient donc à une conclusion qui n’a de vérité ni philosophique, ni économique, ni morale.
Il s’agit donc uniquement d’un serpent qui se mord la queue, distillant de la désinformation afin de nourrir le moulin de la politique de comptoir. Rien de très folichon. Mais je comprends : s’étaler sur la profondeur de ce film c’est se sentir un peu moins capitaliste, un peu moins du côté des méchants, un peu moins moche. Ça change rien, concrètement, mais on montre qu’on a compris. Compris que c’était pas de notre faute, aussi, tant qu’à faire.