Récent amateur d'estampes paysagères japonaises, je m'étonnais de la présence et du rôle de l'être humain - et plus particulièrement du paysan - dans ces représentations.
Nos peintres européens la gomment, ou en font un sujet central, les japonais l'intègrent à leurs œuvres "vue d'oiseau", à la même échelle, en font un élément à part entière, aussi immuable que les montagnes, les rivières et les arbres qu'ils dessinent.
Et bien, L'Île Nue, c’est ça, une estampe.
Une grande fresque dynamique, un voyage dans le labeur paysan, une ode à cette élément du paysage, à ce siège du drame et de la poésie. Toute la réalité de la vie.
La mise en scène, les plans séquences, les vues aériennes, le cinémascope, tout y est. L'estampe est là, elle s'anime, s'offre à l'admiration. Le silence règne, les sons ne font que de brèves incursions pour nous sortir de notre état contemplatif, aux moments cruciaux, pour nous ramener à la "réalité", puis de nouveau, le silence, et la musique, cette musique répétée, comme ces scènes, comme les laborieux dans les images imprimées, toujours les mêmes gestes, les mêmes positions.
Ici, la poésie est fardeau, comme ces deux sauts d'eau. Ânonnée par ces gestes réitérés, elle en devient chorégraphiée. Belle. Mouvante et immobile.
Le drame, lui, est temporel, comme un cri, puis l'éternelle mélopée de la vie reprend, l'effaçant.
Shindo souhaitait raconter une histoire avec des images, sans autres artifices, comme les dessinateurs-graveurs du siècle précédent. Pari réussi.
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