Motivé par les excellentes critiques d'un vénérable membre de SensCritique (Kowalski, si tu me lis...), j'ai décidé de me refaire l'intégralité des "Dirty Harry" (et en bluray, s'il vous plait !). Dans une logique implacable confinant à l'abstraction, je commence donc par le premier. Dingue !
Taxé de tous les noms d'oiseaux à sa sortie (même les plus exotiques), le film de Don Siegel est avant toute chose le produit de son époque, celle d'une Amérique pleine de désillusions et meurtrie par la fin du rêve hippie et l'enlisement du conflit au Vietnam. Affublé du sobriquet peu flatteur de Dirty Harry, l'inspecteur Callahan du film n'est en aucun cas raciste ou fasciste (contrairement au tueur sadique inspiré par le Zodiac qui sévissait à l'époque), mais plutôt une sorte de dinosaure se servant de sa sale réputation pour qu'on lui foute la paix, flic d'un autre temps contestataire remettant sans cesse en question une administration plus soucieuse du protocole que du bien-être des victimes.
Les méthodes dites "expéditives" de Callahan trouvent du coup une sorte de justification dans l'approche de Siegel, abordant son film comme un pur western urbain voyant un représentant de la loi traverser une ville gangrénée par le vice et la violence. La présence dans le rôle-titre d'un Clint Eastwood alors connu pour ses rôles de cowboys est ainsi d'une grande pertinence, sa présence dans "Un shérif à New York" (réalisé précédemment par Siegel) se révélant être la parfaite transition entre son image de flingueur de l'ouest et son nouveau rôle de shérif des temps modernes.
Porté par la mise en scène au cordeau de Don Siegel et la partition aussi funky qu'angoissante de Lalo Schiffrin, ce premier "Dirty Harry" est sans aucun doute un des meilleurs polars des 70's, spectacle violent et outrancier culte à plus d'un titre, offrant à Clint Eastwood un de ses rôles les plus célèbres, mais qui lui collera malheureusement à la peau, les spectateurs ne voyant longtemps en lui qu'une action star à la gâchette facile.