L'Obsédé
7.7
L'Obsédé

Film de William Wyler (1965)

L'obsédé, traduction aussi fidèle qu'erronée du film The Collector de William Wyler, cela du fait de sa double-signification. Car le sens rendu péjoratif par son emploi populaire, lequel correspond à une personne "tourmentée par des obsessions sexuelles", dénote grandement du personnage. Au contraire du sens littéral qui lui convient parfaitement, désignant un "sujet en proie à une obsession". Par ce long-métrage d'environ deux heures, Wyler réalise un huis-clos de très grande qualité. La tension se fait ressentir délicatement, pour ne cesser de se consolider. Non content de se targuer d'un scénario, d'une mise en scène et de dialogues excellents, Wyler peut également être fier de la prestation de ses deux acteurs, Samantha Eggar et Terence Stamp.

Ce dernier campe "l'obsédé" Freddie Clegg, personnalité complexe, car tout aussi lunatique et instable que gentleman animé d'une sérénité froide. Il est The Collector, car il collectionne. Les papillons, d'abord. Que symbolisent donc ces insectes ? Beauté, douceur, harmonie, pacifisme. Mais aussi fragilité, faiblesse et existence éphémère. Qu'en est-il alors de cette même réflexion en considérant cette fois une femme à sa merci, enfermée dans une chambre hermétique, une femme envers qui il voue une obsession incomparable et sans limite ? Freddie Clegg est l'homme qui voit les choses de cette manière. Puisque la belle Miranda Grey ne souhaite pas le rencontrer, il va la kidnapper, la reclure dans son manoir isolé (acheté après avoir gagné beaucoup d'argent) pour la forcer à le connaitre. Nul besoin de préciser son but. Il sait que l'amour doit être partagé pour exister, et lui seul est épris de ce sentiment au moment de leur "rencontre"...

S'agissant de la ravissante Samantha Eggar, jeune rousse au regard d'un azur somptueux, son jeu sonne très juste, et l'on ne peut s'empêcher de s'attacher à elle, que cela tienne à sa beauté innocente sans artifices ou à sa personnalité qui fait d'elle une prisonnière de caractère. Miranda Grey est une étudiante belle, pleine de vie, libre et brillante. Ambitieuse, elle s'est fondue avec grâce et aisance dans la société, au contraire de son ravisseur rejeté par celle-ci. Car les rouages du "socializing" sont partie intégrante de son être, talent dont est totalement dépourvu Freddie Cregg. Elle va se retrouver enfermée aux mains de son kidnappeur, tentant tout pour se créer une faille lui permettant de s'enfuir. Elle n'est pas maltraitée, ou abusée sexuellement, son "hôte" la nourrit régulièrement, la traite avec déférence et respect, usant d'une politesse presque bourgeoise qui dénote pourtant du milieu social duquel il est issu. Mais son espoir de retrouver un jour la liberté connait bien des aléas envers lesquels elle est impuissante.

Sombre, The Collector parvient au moyen de seulement deux personnages qui ont autant en commun que lune et soleil à cerner les différents aspects de l'être humain. Miranda évoque ainsi l'innocence, la joie, la beauté tout en faisant preuve de fourberie afin de tenter de s'échapper. Quant à son ravisseur, il évoque tant les traits du gentleman que du psychopathe. A plusieurs reprises, une sorte de schizophrénie latente se dévoile, subrepticement tout d'abord, avant que la part sombre de son être ne menace de prendre l'ascendant sur le gentleman. Son regard d'un bleu glacial nous effraye parfois, lorsque ce Lui cynique fait surface. Etrangement, sa survenance est toujours corrélative à une attitude déloyale de sa prisonnière. Bien entendu, le statut de Miranda étant celui-ci, il semble normal qu'elle se montre ainsi. Comme elle le dit si bien "je ne serais pas une bonne prisonnière si je ne tentais pas de m'évader". Au début d'ailleurs, il l'entendait comme tel. Mais il va se lasser de ses petites tentatives traitresses, allumant une lueur froide et menaçante dans son regard impassible.

Un film atypique à voir sans détours. L'on y remarquera d'ailleurs plusieurs sources inspiratrices de films ultérieurs. Oui, je me suis délecté de The Collector, dont le personnage fit ce que décrit si bien Miranda en s'adressant à lui : "Ne vois-tu pas ce qui s'est passé ? Tu as eu ce rêve avec moi au coeur de celui-ci, ce n'est pas de l'amour. C'est une sorte de rêve qu'ont les jeunes garçons lorsqu'ils atteignent la puberté, et que tu as fait devenir réalité." La dernière demi-heure est tout simplement haletante, et le "finish" saisissant. Ou comment certaines engeances maléfiques parviennent à trouver la vie et se révéler sous leurs plus "beaux" jours...

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le 29 oct. 2012

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Taurusel

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