Un jeune homme bien sous tous rapports, déjà jeune cadre d'entreprise parisien mais vivant encore chez son père (quinquagénaire veuf, avec une petite boutique d'horlogerie et la tête parfaitement sur les épaules) est entraîné au casino d'Enghien par un collègue de bureau qui, lui, joue régulièrement. Le jeune homme découvre le jeu, s'y essaie et gagne en une soirée un an de salaire. Le lendemain, il ne peut cacher sa joie à son père qui, l'ayant déjà précédemment mis en garde contre cette passion dévorante, finit, le ton montant entre eux, par le virer de chez lui. Le jeune homme s'offre des vacances à Nice, va au casino et y rencontre une femme stylée et séduisante, joueuse invétérée, qu'il avait croisée le premier soir à Enghien.
Ils jouent à la même table, puis de concert. Il semble lui porter chance, elle s'attache à lui, lui tombe amoureux d'elle. Ils gagnent beaucoup l'un et l'autre mais, pris par la frénésie du jeu, rejouent le lendemain, reperdent tout, regagnent, etc. Le scénario est en montagnes russes pendant les trois derniers quarts de l'histoire.
Le couple Claude Mann / Jeanne Moreau (lui 23 ans, elle 35) fonctionne bizarrement assez bien. Ça participe même au charme du film, cette différence d'âges et de personnalités.
Jacques Demy a déguisé Jeanne Moreau en femme sophistiquée, blonde peroxydée, faussement (?) écervelée, et ça ne lui va qu'à moitié, mais une moitié de Jeanne Moreau encore jeune, c'est déjà beaucoup. Claude Mann, lui, est plutôt pas mal dans son rôle de jeune homme tendre, viril, assez sûr de lui et en même temps, complètement amoureux de la joueuse et "flambeuse" mondaine passionnée qu'interprète Jeanne Moreau.
Le casting (Jeanne Moreau, Claude Mann et Paul Guers, dans les rôles principaux) donne au film une sorte d'élégance, de tension, de dangereuse frivolité.
La réalisation de Jacques Demy m'a rappelé un peu celle de Lola. C'est filmé dans un très esthétique noir et blanc, la photographie est belle, les casinos et la Côte d'azur très photogéniques. La musique de Michel Legrand ajoute à tout ça une touche de romantisme échevelé. Et... la fin du film surprend.
On aurait presque envie, tant le réalisateur a su nous intéresser à cette histoire, de savoir ce qui s'est passé ensuite.
Alors, l'amour remède (contre-feu) à la passion du jeu ? Ou simple interlude faussement rassurant ?