Une des docu-fictions les plus réalistes et réussies que j’ai pu voir à ce jour sur les « événements » d’Algérie, restreints ici au cadre d’Alger entre 1954 et 57. A coups de sérieuses documentations, sociales, historiques, politiques, militaires, factuelles, et de mise en scène réalistes témoignant des états d’esprit des Algériens, du FLN, des Pieds-Noirs (quoique eux très survolés et quasi-caricaturés), des militaires en charge sur place, de la France et de l’ONU de l’époque, cette fresque historique franco-italienne de 1966 relate méthodiquement l’escalade indépendantiste. Chacun s’en prenant plein les gencives comme il le mérite durant les étapes allant des premiers attentats à la guérilla urbaine généralisée, en passant par les ruses sanglantes, les violences fourbes et assassines, les insoutenables pressions et les tortures barbares, nous étalant la désespérante chronologie de l’horreur qui s’obstinera tant que durera l’occupation coloniale.
Clairement du point de vue des indépendantistes, mais tout en sachant rendre habilement tant les lettres de noblesses, les respectives motivations, que les cruautés, lâchetés et barbaries de chaque camp, ce film nous fait réaliser dans une accessible ambiance quotidienne l’implantation Française en Algérie depuis 130 ans, l’organisation progressive et conséquente du FLN, les épurations inter-algériennes, les premiers attentats à la bombe, les tueries arbitraires de Français dans les rues, les édifiants (volontaires ?) retards, aveuglements et réponses surréalistes d’inefficacité du gouvernement Français, la naissance de l’OAS, le développement des guérillas et de l’inextinguible nationalisme indigène triomphant. Aucune guerre n’est tendre, mais un réalisateur qui l’a vécue nous rapporte ici, sans angélisme ni héroïsme théâtral engagé et périmé, tous les ingrédients d’une guerre sale.