Staline, ce génie militaire.
Réalisé 4 ans après la fin de la 2e guerre mondiale, La Bataille de Stalingrad s'attache à reconstituer les combats qui eurent lieu dans la ville en 1942/1943 et marquèrent un tournant sur le front de l'Est. Doté de moyens colossaux, divisé en 2 films d'1H30, c'est bien évidemment une pure entreprise de propagande, destinée à faire de Staline le vainqueur de Stalingrad.
La reconstitution se fait sous l'angle stratégique : C'est la bataille dans son ensemble, les énormes mouvements de troupes, les offensives ou postures défensives qui sont mises en avant. La structure qui en découle est quasi invariablement en 3 temps : Les leaders de chaque camps discutent de la stratégie à adopter, les officiers sur le terrain la mettent en œuvre et on assiste au résultat sur le champ de bataille.
En terme de leader, c'est évidemment Staline qui tire la couverture à lui. Le petit père des peuples y est décrit comme une sorte de gentil tonton au calme olympien. Désintéressé à l’extrême, il n'ordonne quasiment jamais à ses généraux, se contentant de proposer ou de suggérer. Mais ses idées sont tellement géniales que ces collaborateurs ne peuvent que s'extasier devant et s'empresser de les exécuter. La victoire à Stalingrad, c'est incontestablement à lui qu'on la doit !
Comparé à Staline, ses généraux ne sont que des figures en carton. Ils se contentent de se tenir droit, d'affecter une mine sérieuse (ou satisfaite après une victoire) et d'approuver leur chef. On notera une absence de taille, celle de Joukov. Absence on ne peut plus volontaire puisque le véritable vainqueur de Stalingrad était alors en disgrâce, Staline voyant sa popularité d'un bien mauvais œil. On peut d'ailleurs résumer l'existence de cette Bataille de Stalingrad à ce simple fait politique.
Le camps Allemand est décrit d'une manière assez similaire, Hitler étant la figure centrale. Mais là où Staline ne s'énerve jamais, le Führer passe son temps à tempêter et à rouspéter.
Tout cela serait assez pathétique et ennuyeux (les discussions s'étirent à l'infini et sont souvent d'une platitude extrême) s'il n'y avais pas les reconstitutions des combats. Les moyens déployés sont proprement hallucinants : Des milliers d'hommes, des chars à gogo... Le tout servi par une technique irréprochable. Petrov a régulièrement recours à des plans larges, en long travelling, qui rendent parfaitement la dimension des affrontements. Souvent, on se croirait devant d'authentique images d'époque (l'arrivée des allemands, les préparations d’artillerie...). Et quand ce n'est pas le cas, on ne peut qu'être impressionné par la beauté ou la maestria des plans (la défense de la maison, la fuite désespéré des allemands cernés par les tombes). Une technique que Serguei Bondarchuk ou Mikhail Kalatozov raffineront par la suite.
Étant donné qu'aucun personnage en dehors des dirigeants n'est développé (ce sont tous des archétypes héroïques soviétique), l'implication émotionnelle est toutefois très réduite. Ce défaut sera partiellement corrigé dans La Bataille de Berlin, aboutissement ultime de l'entreprise de légitimation du leadership de Staline dont cette Bataille de Stalingrad pose les bases.