La rose pourpre du coeur.
Il y a des films que j'ai envie d'aimer, de défendre, parce qu'ils osent quelque chose, parce que leurs intentions sont louables et nobles, en ces heures de cynisme ambiant. Mais bien souvent, malgré toute la bonne volonté du monde, les intentions ne suffisent pas.
Huit ans après le mal-aimé "Silent Hill", Christophe Gans, cinéaste que j'apprécie beaucoup car transpirant la passion du cinéma par tous les pores, revient enfin aux affaires pour signer une nouvelle adaptation du célèbre conte, avec comme objectif semble-t-il de revenir aux grandes heures du cinéma populaire français, comme il l'avait déjà tenté il y a presque quinze ans avec "Le pacte des loups".
Aidé par un budget plus que confortable, Gans donne libre cour à son imagination et à son sens du spectacle, donnant vie à un véritable livre d'images, il faut le dire, formellement magnifique, aux décors majestueux et aux costumes somptueux, le tout rappelant par instant les illustrations de Gustave Doré.
Mais comme bouffé par sa propre générosité, Christophe Gans en fait trop, noie son film sous une couche trop épaisse de CGI disgracieux, cherchant à tout prix le plan qui tue. Même refrain en ce qui concerne le scénario, virevoltant aux quatre vents dans sa dernière demie-heure, et passant du coup totalement à côté du sujet: la relation entre son héroïne campée avec fadeur par Léa Seydoux (qui trimballe comme de coutume son air blasé pendant tout le film) et une bête aussi séduisante qu'effrayante, à laquelle Vincent Cassell apporte une présence certaine malgré un faciès bien trop numérique.
Des défauts extrêmement regrettable, car cette nouvelle version de "La belle et la bête" est loin d'être la bouse annoncée, et renferme même quelques belles envolées lyriques. En effet, en plus de frôler fugacement la grâce (la scène sur le lac gelé, sublime), il émane du film de Gans une douce mélancolie et un sens de la tragédie qui aurait put en faire un grand film.
Louable tentative d'offrir aux spectateurs de tous âges un divertissement enchanteur et dénué du moindre cynisme, "La belle et la bête" peine malheureusement à atteindre ses objectifs, conte de fée peut-être trop généreux pour son propre bien, qui risque de plus de trouver difficilement son public, trop noir pour les petits bouts de choux et trop innocent pour les adultes.