Bertrand Bonello dépoussière Henry James (et Roy Orbison, avec son désuet Evergreen bourré de charme) et n’a pas peur de s’attaquer à l’amour et la peur dans une endurante réflexion aussi théorique qu’esthétique. Il trouve son propre fil rouge pour lier ses segments et époques diverses (dont seulement une, au 19e siècle, correspond à la nouvelle dont il propose une adaptation) : les poupées. Qu’elles soient en celluloïd (inflammable, comme son son cinéma) ou admirablement incarnées - Léa Seydoux et Gustalgie Malanda - elles nous angoissent profondément pour ce qu’elles représentent : la perte froide et inévitable de tout affect.
Un rapport aux images et aux émotions sans cesse interrogé, comme une question qui transcende le film : est-ce qu’on aime comme au cinéma ? La réponse de Bonello dévaste autant qu’elle fascine, et seuls résonnent les cris de Léa Seydoux. L’amour finit toujours par n’être plus rien, et il ne restera qu’un un grand mystère, une ombre : La Bête, et notre immense épouvante.