La Bête
6.2
La Bête

Film de Bertrand Bonello (2023)

J’aimerais tellement l’adorer, ce Bonello, inspiré de La bête dans la jungle, d’Henry James. Or j’ai navigué entre la fascination et l’embarras puis l’ennui, beaucoup. L’impression d’avoir vu un épisode allongé de Black mirror. Qui manque d’équilibre, partout. Ne serait-ce que dans ses époques : Bonello l’a prouvé dans L’Apollonide, souvenirs de la maison close l’époque qui lui sied (d’un point de vue graphique et nostalgique) c’est celle du début du XXe siècle. C’est celle qui m’a semblé la plus intéressante ici aussi, la plus cinégénique.


Ce déséquilibre se joue aussi sur les personnages. Louis n’existe pas assez et pour tout dire je trouve l’acteur (George MacKay, croisé notamment chez Mendes, dans tous les plans de 1917) un peu limité pour le rôle. Ce n’est que mon avis mais si Gaspard Ulliel avait incarné ce rôle (qu’il aurait dû incarner, le film lui est dédié) ça aurait peut-être crée plus de symbiose avec le jeu de Seydoux, qui elle, incarne Gabrielle : elle dévore tout. Excepté le dispositif théorique général, brutal et abscons, mélangeant crue parisienne de 1920 et tuerie d’Isla Vista en 2014 avec une prise de pouvoir de l’intelligence artificielle dans un futur non donné, mais les plongées dans les vies antérieures (trop resserrées, peut-être ?) n’apportent jamais le vertige d’un Weerasethakul, par exemple.


La bête c’est un peu comme si Resnais rencontrait Marker, comme si Je t’aime je t’aime (le plus grand film du monde) côtoyait La jetée (l’autre plus grand film du monde). Dans une version ratée, qui rappelle in fine beaucoup son précédent film, Coma, qu’on peut voir comme étant le brouillon de celui-ci. Beaucoup moins fulgurante et émouvante surtout. J’ai trouvé ça très froid. Pas été touché une seconde : pas même lors de la superbe séquence de l’inondation de l’usine à confection de poupées.


Pourtant, si je n’aime véritablement pas grand-chose dedans – le film est très indigeste en plus (au moins sur un premier visionnage) – j’ai parfois aimé m’y perdre, un peu comme dans les rares moments de Cloud Atlas, auquel j’ai parfois songé. Me noyer dans ses mystères, être frappé par quelques pics fulgurants (les bugs de la machine, notamment), trop épars malheureusement et ce jusque dans ce non-générique final (un QR code à scanner) idée forte qui fait pschitt je trouve. Quoiqu’il en soit, stimulant film de mise en scène, comme d’habitude avec Bonello, mais c’est le minimum que j’attends de lui.

JanosValuska
6
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le 21 sept. 2024

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JanosValuska

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