La singularité de ce moyen métrage est de créer ce dispositif parallèle où le garçon, afin de palier à l’absence de celle qu’il s’est convaincu d’être sa promise (et le sera puisque le film se ferme sur ses mots nous annonçant, en sortant de la fameuse boulangerie dans laquelle sa boulangère n’est plus, qu’il est marié depuis six mois) se met à batifoler autour d’une jeune boulangère dont il n’est guère épris mais avec laquelle il appréhende une relation de substitution provisoire et ouverte, comme s’il se faisait la main en somme, sorte de vengeance personnelle visant à attendre l’une tout en jouant avec l’autre. Le paradoxe veut qui plus est que le titre du film, malicieux, soit déplacé par rapport au récit, dans la mesure où Jacqueline n’est qu’un instrument au rapprochement d’avec Sylvie et sera par ailleurs abandonnée plus tard au rendez-vous bien qu’on ne sache, dès l’instant de la retrouvaille inattendue, ce qu’elle deviendra ensuite. C’est le premier volet des contes moraux, symbolisés six essais durant par une voix off prépondérante, un personnage central narrateur qui expérimente le jeu de la séduction dans un triangle amoureux précis. C’est déjà une esquisse à Ma nuit chez Maud, avec l’attention au personnage féminin qui est substituée par une autre durant la majeure partie du film. Maud comme la boulangère ne sont que des provisoires, des femmes pour l’attente, rencontres sans but sinon celui de guider et d’accompagner le personnage masculin dans ses interrogations jusqu’à cette relation qu’il convoite envers et contre tout. En grand peintre, Rohmer fait ici la toile de l’autisme. Il y aura l’autisme religieux, bohême ou celui de l’isolement. Ici le personnage palie à son manque en se construisant un autre objectif centré sur l’errance quotidienne en soignant chaque jour de plus en plus ses entrées dans la boulangerie, faisant des avances à Jacqueline tout en sachant qu’elle finira par être évincée nette le jour où Sylvie réapparaitra. C’est un film magnifique, tout en variations, déjà très complexe.
JanosValuska
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le 18 déc. 2013

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