Jacob Duff,homme d'affaires vieillissant,a un gros défaut:il est extrêmement versatile.Il s'entiche des gens,s'en lasse très vite et les jette.C'est le cas avec Regina,sa dernière épouse en date,dont il voudrait se débarrasser.Mais il y a un problème nommé Lou,la vieille tante richissime de Jacob,dont il espère bien hériter.Seulement cette dernière adore Regina et déshéritera Jacob s'il s'en sépare.Ce mari indélicat veut alors prendre son épouse en flagrant délit d'adultère afin de la discréditer aux yeux de sa tante mais l'opération s'avère compliquée car sa femme est la perfection incarnée.Jeune,jolie,gentille,fidèle,honnête,dévouée,soumise aux désirs de son époux,il est impossible de lui reprocher quoi que ce soit.Jean-Pierre Mocky,friand de polars anglophones,adapte ici un roman de l'oubliée Elisabeth Sanxay Holding,sorte d'Agatha Christie avant l'heure.Réalisateur,scénariste,monteur et acteur principal,il livre un brouillon de l'excellent "13 French Street" qu'il portera plus tard à l'écran.On y retrouve cette ambiance rétro-british désuète et charmante,ainsi que ces personnages tous ambigus et ces décors de manoirs cossus et de bords de mer nostalgiques,même si l'héroïne est ici une oie blanche,tout le contraire de la salope absolue de "13 French Street".La photo en clair-obscur d'Edmond Richard,secondé par Michel Gallois,colle bien à cette atmosphère,tout comme la musique démodée d'Eric Demarsan.Le décorateur Jean-Pierre Doucet a fait fort en dénichant en Normandie des lieux enchanteurs hors du temps.Ce qui va moins bien,c'est la mise en scène lente et arythmique de Mocky et son scénario alambiqué qui entraîne une joyeuse confusion,tout ceci gâchant largement un spectacle qui aurait pu être agréable.Il y aura toutefois un twist final délicieusement cynique pour achever le film sur une bonne note.Autre bon point,l'habituel goût pervers de JP pour les figures étranges et décalées,comme ce détective à pied-bot,son associé qui ponctue toutes ses phrases d'un atroce sourire de demeuré,l'associé de Jacob au défaut de prononciation et à l'accent bizarres ou ce vieillard vindicatif qui règle ses comptes à la cravache.A la tête d'une distribution hétéroclite,Mocky fait encore une fois étalage de ses insuffisances dans le domaine de l'art dramatique en jouant horriblement faux,ce qui handicape fortement l'impact de l'histoire,tout comme sa compagne Patricia Barzyk,raide et inexpressive.La jeune première Emilie Hébrard,qu'on n'avait jamais vue et qu'on ne reverra pas,est charmante et joue les cruches de manière si parfaite qu'on se demande si le rôle est de composition.Des revenants sont à l'affiche avec l'excellente Alexandra Stewart,formidable en vieille lesbienne fortunée couchant avec sa domestique noire au milieu d'une maison Art-Déco ou Pierre Cosso,qu'on n'avait guère revu au cinéma depuis sa révélation en beau gosse dans "La boum 2" en 82 et qui s'était illustré au théâtre entre 2000 et 2002 dans "Ladies night",la pièce à succès ayant inspiré "The full Monthy",qui lui avait valu de se prendre un pain dans la tronche de la part d'un de ses partenaires.Il est ici très bon en chauffeur de maître voyou.Dick Rivers est l'inspecteur de police et débute au ciné.Il y fera une seconde et dernière apparition en 2003 dans "Le furet",autre film de Mocky.Peu d'acteurs de complément dans "La candide madame Duff",mais on peut cependant voir quelques permanents du Mocky Circus tels qu'Henri Attal,Christian Chauvaud,Jean-Pierre Clami,Georges Lucas,pas celui de "Star Wars",et Emmanuelle Weber.