Le western "la captive aux yeux clairs" d'Howard Hawks est tiré d'un épais roman, passionnant, du même nom, de A.B. "Bud" Guthrie. Le scénario du film ne reprend qu'une petite partie du livre en simplifiant notamment certains personnages, en en "fusionnant" d'autres. De plus, le roman s'étale sur une bien plus longue période de temps d'environ une quinzaine d'années et comprend plusieurs expéditions.
Mais une chose est certaine, c'est que l'esprit du livre en est parfaitement respecté et on retrouve dans le film les principaux personnages avec les mêmes caractères. Pour l'anecdote, le roman a été édité chez Babel et est postfacé par un Bertrand Tavernier émerveillé ...
Le film raconte l'épopée en 1830 de la première expédition de trappeurs vers des régions inexplorées du Nord Ouest des Etats-Unis, en remontant le Missouri jusqu'à atteindre et nouer de fructueux échanges avec la tribu indienne Blackfoot.
Hawks met en scène l'amitié (virile) de deux jeunes gens, Jim Deakins et Boone Caudill qui rejoignent l'expédition avec l'oncle de ce dernier, Zeb Calloway. Le chef de cette expédition ayant récupéré une indienne Blackfoot, Teal Eye (Gazelle en VF) dispose ainsi d'un atout pour la future négociation avec les indiens. Superbement belle avec ses beaux yeux de biche (ou de gazelle, si j'en crois le nom donné dans la VF), nos deux jeunes vont en tomber amoureux. Forcément.
Mais le western est bien plus que cela.
D'abord, un profond humanisme s'en dégage ; il y a l'apprentissage de la tolérance et de l'acceptation de l'autre, de l'éventuel rival. Lors de leur première rencontre Boone et Jim se foutent sur la gueule avant de se reconnaitre amis pour toujours. Boone déteste les indiens et tient à leur encontre des propos et un comportement insultants mais apprendra peu à peu à les respecter grâce, entre autres, à l'influence apaisante de Jim. Comme si les gamins qu'ils étaient au départ devenaient progressivement adultes. Même le "triangle amoureux" ne conduira pas à la destruction de l'amitié entre les deux hommes.
Les conflits à l'intérieur de l'expédition ou même face à l'entreprise concurrente de commerce de fourrure vont trouver une conclusion heureuse. Est-ce pour autant un western "bisounours" ? Non, pas vraiment car il y a quand même des échanges rugueux, il y a des gens qui se font tuer et l'expédition rencontre de nombreuses difficultés, il y a une attaque soudaine d'indiens qui interrompt brutalement une fête. Simplement, il y a une détermination positive de Hawks.
Et puis, ce film est un hommage à la nature sauvage de cette région, à ce fleuve, le Missouri , bordé de forêts épaisses, alimenté d'autres rivières qui arrivent en cascades… que Hawks prend plaisir à filmer en plans larges sans effets techniques particuliers. Comme si la nature s'imposait d'elle-même sans qu'on ait besoin de la maquiller ou d'en améliorer l'image.
Côté casting,
C'est Kirk Douglas qui tient le rôle de Jim Deakins, loyal, enjoué, heureux de vivre.
Dewey Martin campe le personnage de Boone Caudill, qui est le personnage le plus complexe du film car il commence jeune, irréfléchi, raciste et intempestif puis devra évoluer en devenant adulte, tolérant et responsable.
Till Eye (Gazelle dans la VF) est jouée par une belle actrice Elisabeth Threatt d'origine partielle Cherokee dont ce sera l'unique rôle de sa carrière.
Arthur Hunnicutt joue le rôle truculent de Zeb Calloway, l'homme à tout faire de l'expédition : chasseur, chirurgien, interprète (c'est le seul à parler indien), stratège et conseil du chef de l'expédition, accessoirement, grand amateur de boissons fortes.
Et pour finir, Hank Worden qui joue le rôle de l'indien Blackfoot "Pauvre Diable" qui s'avérera fort utile dans l'expédition. Il contribuera à améliorer l'acceptation de l'indien parmi l'expédition. C'est aussi quelqu'un qu'on voit dans de nombreux westerns comme la "prisonnière du désert" où il joue le personnage qui rêve de posséder un "rocking chair" ...
"La captive aux yeux clairs" est un grand western atypique puisque certains osent dire que ce n'est pas un western mais un bête film d'aventures … qui se passerait dans l'ouest américain avec des indiens… Franchement !
Je répète : "La captive aux yeux clairs" est un grand western sympathique, humaniste, chaleureux.
C'est dit !