La Chambre bleue par Camille S.
Enfermé dans son secret, dans sa cellule et dans son cadre resserré, le personnage de Julien ne sait plus comment échapper à son histoire. Femme et amante, toutes deux troublantes, savent à peine sourire. Elles le regardent, toujours longuement. Pour se convaincre, chacune, qu'il l'aime encore. Aux questions de sa maîtresse (je t'ai fait mal ? tu m'en veux ? tu m'aimes ?) succèdent celles des interrogatoires, la police, le juge, le psychologue. Les nôtres (qui est mort ? qui a tué ?) restent longtemps sans réponse.
Les plans sont (presque) carrés, statiques, arrêtés. On photographie la chambre d'hôtel comme une scène de crime, on s'attarde sur des détails pour qu'ils fassent sens, comme les témoignages se recouperaient dans une enquête. La goutte de confiture rappelle la goutte de sang, une mouche sur le papier peint du tribunal vient distraire l'accusé et lui rappeler l'abeille sur le ventre de son amante, la guêpe sur la glace de sa fille.
Amalric est humble et consciencieux dans sa mise en scène. Respectueux de l'auteur qu'il adapte, il fait d'un livre cinématographique un film littéraire. C'est propre et sérieux. Trop propre peut-être. Peut-être trop sérieux. Regard froid sur l'Origine du monde, chair dépassionnée, le film manque cruellement d'érotisme. Il a beau mouiller les corps de sueur et les faire jouir sous la pluie, on reste dubitatif sur la passion, les sentiments et donc les motivations des personnages.