Grandiose, bluffant, éblouissant de couleurs et de pureté saturée, la Cité Interdite de Yimou est un véritable kaléidoscope, un terrifiant kaléidoscope, tant les couleurs sont nombreuses et le détail paufiné jusqu'à l'étouffement. Difficile en effet de respirer dans ce palais de couloirs arcs-en ciel où la beauté éclate en un scintillement d'étoiles pourpres.
Car La Cité Interdite est un film sur la rage, sur l'explosion des émotions contradictoires qui animent ses protagonistes. La violence naît ici du foisonnement ininterrompu des images, dans la somptuosité des étoffes et la froideur des visages plus que dans le développement narratif d'une histoire somme toute peu originale.
Le synopsis avoue en effet déjà tout du film : complots, trahisons, pouvoir, amours contrariées, humeur violente qui parcourt les veines, se déploie, se saigne à blanc...
Autant dire que le spectateur ne trouvera ici rien de révolutionnaire. Le véritable enjeu du film n'est d'ailleurs peut-être pas dans son histoire mais dans le festival visuel auquel elle sert de prétexte, dans cette tension spectaculaire entre les contrastes et les couleurs.
La malédiction du chrysanthème (traduction du titre original, ou presque) est l'histoire d'une beauté qui s'épanouit dans une rage contenue et éclate soudain, somptueuse, immense. Champs de chrysanthèmes étouffés par de hautes murailles, perfection de Gong Li, de Jay Chou, de Chow Yun-Fat, dévoilée par de magnifiques plans fixes sur les visages découpés dans l'ivoire et l'ébène.
En dépit de ses évidentes défaillances, le film demeure un objet cinématographique puissant, habité par un esthétisme extrême qui vous colle durablement à la rétine.
Et c'est déjà pas si mal.