Bijou !
Je n'ai que rarement été déçu par Sidney Lumet, mais ce film est quand même assez exceptionnel même pour une filmographie de haute volée comme la sienne.
Parce que là il y a tout, un seul lieu, à savoir une prison de l'armée britannique qui enferme ses propres soldats, des acteurs géniaux, Sean Connery en tête bien évidemment, mais Harry Andrews n'est pas en reste non plus et surtout une mise en scène exemplaire qui parvient à te faire sentir le poids des épreuves que doivent traverser les personnages...
Et niveau épreuves il y a bien évidemment cette colline qui donne son titre au film et la manière qu'a Lumet de filmer les hommes qui la parcourent. La premières fois que les héros du film doivent l'arpenter c'est quasiment filmer en plan séquence, où la caméra suit à bonne distance ceux qui sont tête, ils sont d'abord cinq, puis quatre, puis trois, puis deux... on voit les corps de ceux qui n'en peuvent plus marcher au ralenti, s'effondrer, tandis que même les gaillards les plus costauds galèrent à mort... Rien de mieux pour t'en faire ressentir l'intensité : voir les personnages l'éprouver, les voir souffrir et la longueur du plan permet ça. On voit chaque passage en entier, on voit comment ils s'affaiblissent petit à petit...
C'est foutrement bien fait.
Puis bien sûr il y a toute la lutte contre la hiérarchie militaire qui se couvre les uns les autres, qui ne pensent plus, qui ne font qu'obéir et il y a quelque chose de jouissif à voir Connery réussir petit à petit, droit dans ses bottes, à marquer des points...
J'aime beaucoup le traitement de King, soldat noir qui à force d'être victime de racisme décide de rejeter l'uniforme, il montre que l'autorité ne tient que parce qu'on la respecte et qu'on obéit. Le moindre « non » peut commencer à mettre à mal l'engrenage... Mais le film n'oublie pas de montrer que la plupart des gens sont lâches et facilement impressionnables et se laissent malgré tout faire.
Puis, forcément, il y a cette fin aussi cathartique que frustrante...
En tous cas Lumet arrive à nous plonger dans la chaleur de sa prison et dans l'inhumanité du système carcéral avec cette hiérarchie aussi bête qu'incompétente, ce qui la rend dangereuse...
Un pur régal ! Je crois que ça fait longtemps que je n'ai pas vu 2h de film passer aussi vite !
Par contre il y a peut-être un aspect que j'ai pas nécessairement compris, un des gardiens fait des remarques sur l'homosexualité présumée d'un personnage laissant sous entendre qu'il devrait passer à la casserole pour avoir un traitement de faveur... Alors certes il y a plusieurs références à l'homosexualité dans le film, notamment avec le médecin qui examine le pénis du soldat noir, mais disons que je trouve ça surprenant que cette invitation du gardien reste sans suite et ne trouve pas écho plus tard dans le film...