Neil Jordan se livre à une démystification des contes avec cette nouvelle approche du loup et du loup-garou qui revisite carrément "le Petit chaperon rouge" et quelques autres comme "le Petit Poucet"... Cette vision n'est cependant pas enfantine car en sous-main, il s'agit de l'éveil à la sensualité d'une jeune fille, plus tout à fait petite fille et pas encore femme, dont la grand-mère fait tout pour la brider en racontant des histoires morales pour la mettre en garde contre l'homme et le loup qui ne font qu'un. Il y a dans tout ça quelque chose de freudien, le réalisateur propose une lecture troublante et baroque, mais son propos est asséné de façon psychanalytique, en mélangeant le rêve et la réalité, si bien que par endroits, on est un peu désorienté, c'est assez creux et surtout il manque cet aspect merveilleux qui aurait dû enrober ce conte de fée pour adulte et qui aurait pu lui donner un cachet mirifique.
Jordan construit son film autour de la fascination du loup et de l'univers de la forêt, lieu de tous les dangers et des peurs enfantines, où les loups veillent dans l'ombre. Ce qui sauve un peu ce film, c'est justement son esthétique due à son imagerie qui offre une plongée dans un ailleurs, un monde lointain et étrange dans lequel il lâche le chaperon rouge, la mère-grand et le loup, la forêt est intégralement reconstituée en studio, dense, profonde, mystérieuse, terrifiante, c'est d'une beauté inouïe et ça rappelle les vieux livres illustrés, les plans des loups aux yeux phosphorescents dans la nuit sont magnifiques, dommage que ça ne soit pas servi par un scénario plus élaboré. L'autre atout, ce sont quelques scènes de transformations étonnantes en 1984, du temps où ça se faisait encore de façon mécanique avec un montage adapté, mais qui paraitront assez kitsch aux nouvelles générations.
Un conte imparfait qui glorifie le loup en y mêlant symbolisme, érotisme latent et fantastique horrifique.

Ugly
6

Créée

le 16 janv. 2019

Critique lue 467 fois

18 j'aime

3 commentaires

Ugly

Écrit par

Critique lue 467 fois

18
3

D'autres avis sur La Compagnie des loups

La Compagnie des loups
real_folk_blues
6

La queue du loup...

Avant de s’attaquer au mythe du vampire, dont on pensait peut être à l’époque de la peinture d’Anne Rice qu’elle était trop maniérée —pauvres fous que diriez vous maintenant des vampires portant des...

le 29 août 2013

30 j'aime

25

La Compagnie des loups
-Marc-
6

L'appel du loup

Variations fantasmagoriques autour du conte de Perrault. "On voit ici que de jeunes enfants, Surtout de jeunes filles Belles, bien faites, et gentilles, Font très mal d'écouter toute sorte de...

le 23 févr. 2014

20 j'aime

5

La Compagnie des loups
takeshi29
5

Toi aussi t'aimais la compagnie de Mad Movies quand t'étais louveteau ?

On était en 1985, à une époque où Mad Movies, Starfix & Co offraient aux slips d'une génération de polissons leurs premiers émois, Neil Jordan s'était mis en tête de pondre un "Petit chaperon...

le 1 mai 2020

19 j'aime

15

Du même critique

Il était une fois dans l'Ouest
Ugly
10

Le western opéra

Les premiers westerns de Sergio Leone furent accueillis avec dédain par la critique, qualifiés de "spaghetti" par les Américains, et le pire c'est qu'ils se révélèrent des triomphes commerciaux...

Par

le 6 avr. 2018

123 j'aime

98

Le Bon, la Brute et le Truand
Ugly
10

"Quand on tire, on raconte pas sa vie"

Grand fan de westerns, j'aime autant le western US et le western spaghetti de Sergio Leone surtout, et celui-ci me tient particulièrement à coeur. Dernier opus de la trilogie des "dollars", c'est...

Par

le 10 juin 2016

98 j'aime

59

Gladiator
Ugly
9

La Rome antique ressuscitée avec brio

On croyait le péplum enterré et désuet, voici l'éblouissante preuve du contraire avec un Ridley Scott inspiré qui renouvelle un genre ayant eu de beaux jours à Hollywood dans le passé. Il utilise les...

Par

le 5 déc. 2016

95 j'aime

45