Le Caire nid d'espions
Avec Boy from Heaven, qui aurait pu s'intituler Le Caire nid d'espions, Tarik Saleh passe manifestement un cap, et avec quel éclat. Le principal lieu de l'action n'est pas n'importe lequel :...
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Une sorte de thriller politique, qui explore le thème assez classique des luttes d'influence entre pouvoir religieux et pouvoir laïc. L'originalité résidant dans le fait que l'action se situe en Égypte; le film est l’œuvre d'un réalisateur suédois, Tarik Saleh, d'origine égyptienne et émigré de la seconde (ou peut-être plus) génération. Un gars qui en tous cas continue à s'intéresser à ce qui se passe dans le pays de ses ancêtres - voir son précédent opus "Le Caire confidentiel" - mais dont les films sont financés par des capitaux suédois ou plus généralement d'Europe occidentale. Ce qui ne va pas sans soulever quelques questions d'ordres divers : aurait-il pu tourner un tel film en Égypte ? Et à l'inverse, a-t-il un regard pertinent sur ce qui se passe en Égypte, sachant qu'il n'y vit pas, ou ne filme-t-il pas ce qu'un public occidental attend de voir de l’Égypte ?
Je n'ai pas les réponses et chacun se fera sa propre opinion sur le sujet. Ce qui est certain, c'est qu'il a la capacité à pondre un thriller plutôt efficace, au scénario tortueux, parfois un poil branlant, mais malgré tout convaincant. Autour d'un pitch lui aussi classique : le pauvre gars qui débarque de sa campagne et qui est pris dans un engrenage auquel il ne comprend pas grand chose. Mais un pitch qui s'écarte du poncif hollywoodien au sens où il ne se sort pas triomphalement des multiples pièges qui lui sont tendus par les seules forces de son astuce et de sa volonté : il fait de son mieux, mais devra s'en remettre au destin, ainsi qu'un peu aussi à la piété de certains.
Le film a également le mérite de ne pas montrer l'islam sous un jour caricatural, mais comme une religion semblable aux autres, avec ses factions, certaines fondamentalistes, d'autres humanistes, ses dignitaires opportunistes. Son travers patriarcal - qu'il partage soit dit en passant avec la plupart des religions - n'est pas pour autant laissé de côté : on ne voit que très peu de femmes dans le film, et lorsqu'on les voit elles sont à la cuisine ou torchent les gamins. Bon, à vrai dire, c'est le même topo côté police secrète égyptienne : que des hommes en action, et dont certains ont pu conserver une once de conscience en dépit des basses manœuvres auxquelles ils se livrent avec zèle.
Au final, ça donne un film pas désagréable à regarder, peut-être un peu lent au début, mais qui devient sur la fin plutôt captivant, mais dont l'originalité réside essentiellement dans le décor où il prend place.
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le 1 nov. 2022
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