La Corde est un petit bijou d'Hitchcock. Assez mésestimé par rapport à ses autres chefs d'œuvre, il s'agit de son premier film en couleur. Il faut le préciser, car les couleurs sont déjà parfaitement utilisées pour identifier et caractériser les personnages principaux. Les deux tueurs sont en effet diamétralement opposés, l'un étant flamboyant dans un costume bleu étincelant, l'autre bien plus réservé dans son costume terne terracotta. L'esthétique se double d'une technicité remarquable, ce huis-clos étant un long faux plan-séquence (en réalité une suite de 7-8 plans). Le scénario, aussi simple que loufoque, tient pourtant en haleine du début à la fin : deux amis (ou un couple ?) tuent l'un de leurs amis par pur plaisir, et, le corps encore chaud dans l'appartement, organisent une réception avec des amis et de la famille de la victime. Pendant toute l'intrigue, tout ne tient qu'à un fil - qu'à une corde, que parviendra peut-être à dénouer un ancien professeur, joué cette fois admirablement bien par James Stewart, cynique à souhait. Toutes les scènes, les dialogues, les débats, les faits et gestes, les doutes et les soupçons peuvent mener à la résolution de l'intrigue, mais il faut bien attendre la fin du film. Elle s'avère pourtant trop peu surprenante, et c'est le seul point faible du film, pardonnable au vu de la tension jusque-là. Mention spéciale à John Dall, qui joue merveilleusement bien le bourgeois parfaitement sociable et insoupçonnable, cachant son véritable fond de psychopathe. American Psycho avant l'heure !