Lovecraft...
Tout le monde (du moins les amateurs de S-F et ou d'horreur) connait le fameux Howard Phillips Lovecraft, son œuvre unique, son talent pour avoir créée un Univers qui lui est propre.
Univers qui inspirera:


-d'autres écrivains comme Stephen King ou Dean Koontz
-mais aussi des réalisateurs (John Carpenter en tête, Brian Yuzna...),
-des peintres (H.R Giger bien sûr, mais aussi Ian Miller, François Launet...),
-des illustrateurs (Rowena Morrill, Dave Carson...).
Bref, sans Lovecraft, l'horreur aurait été moins folle...


Alors évidemment, lorsque l'un de ses récits est adapté au cinéma, ça fait toujours grincer les dents d'une certaine élite, parfois à raison (The Curse, The Unnamable...), parfois à tort malgré des budgets mini (Re-Animator, From Beyond).
On sera tous d'accord pour dore que les meilleures adaptations ne l'ont jamais été de manière officielle, comme l'insurpassable The Thing et le troublant In The Mouth of Madness (tous deux du génial Big John) sans oublier l'excellent The Mist, basé sur King qui s'est lui-même inspiré de Lovecraft...


Alors, Color Out of The Space a déjà eu droit à plusieurs conversions cinéma avec:


-Die, Monter Die! (1965),
-le plus ou moins fidèle (mais mou) The Curse de 1987,
-Colour From The Dark en 2008,
-l'étonnant et très sobre Die Farbe en 2010,
-et enfin ce Color Out of The Space de l'ami Stanley.


Alors, j'aime l'Univers de Lovecraft (excepté sa propension "white power") car c'est la matrice des meilleures œuvres d'horreurs ou S-F sorties depuis plus 60 ans (quand même !).


Pourquoi donc refaire une adaptation d'un film maintes fois adaptés ?


Franchement, je ne sais pas.
Surtout que Die Farbe était quasiment une adaptation littérale de la nouvelle de Lovecraft, avec son tempo lent, ses magnifiques paysages baignés dans un N&B très immersif...
Mais pour moi, quand je pense "Lovecraft", je pense "abomination" et "folie" (ce qui ne caractérisait donc pas Die Farbe, qui misait tout sur un certain naturalisme).
Donc, cette version 2020 renoue avec le côté "organique" des horreurs issues du cerveau d'Howard, sans oublier l'importance du son "organique"...


West of Arkham by Colin Stetson
https://www.youtube.com/watch?v=WxcdsIQqr6g&list=PLfzW_wEeYxk46Lk_0JDVmM2mFlyJbqY5F


Richard Stanley...
Ayant beaucoup aimé Hardware et son ambiance inéluctable, un peu moins l'étrange Dust Devil (que je vais devoir revoir) et le patchwork Island of Dr Moreau, je fus fort surpris (agréablement parlant) de le retrouver à la réal et au scénario de ce Color...
J'aime ainsi le personnage car il est un artiste hors du système "classique" qui - outre la réalisation et l'écriture - est aussi capable de storyboarder son récit (celui de Island of Dr Moreau promettait bien, avant qu'il ne soit éjecté pour cause d'intégrité artistique au profit du plus malléable (toutes proportions gardées) John Frankenheimer par la New Line) et donc d'apporter sa vision au projet, quelle qu'elle soit.


D'ailleurs, j'ai dans l'optique d'aller lui rendre visite un de ces quatre pour bavarder post-apo et génétique...
Mais je digresse, là...


Bref, revenons au film.


On va dire que la première demie-heure, c'est mou voire télévisuel. Je me demandais d'ailleurs où donc était passé le style Stanley, puis...puis tout bascule progressivement dans l'horreur, la vraie !


A ce titre, je peux dire sans me tromper que j'ai tellement vu de films d'horreurs dans ma vie qu'il m'en faut beaucoup pour ressentir un certain malaise.
Et ce malaise vient avec


le calvaire de Theresa...Calvaire organique illustré par un sound design terrifiant (les gémissements déchirants de l'enfant et de sa mère, fusionnés en un seul corps palpitant et suintant d'humeur visqueuse.
Il est d'ailleurs à noter que Joely Richardson (belle-soeur de Liam Neeson vue dans le chouette Event Horizon) arrive à faire passer toute la détresse et l'horreur de la situation via son visage, lors de ces scènes de fusions des chairs...


Quant à Nicolas Cage, il commence le film en mode automatique puis dès lors que la Couleur se répand, il devient de plus en plus instable et retrouve un peu de son éclat d'acteur travaillant à la chaine (obligé depuis 2011 à tourner plus vite que son ombre pour rembourser ses dettes et son divorce).


Alors oui, tout n'est pas parfait mais déjà, il faut saluer cette petite production (un budget en deçà de 12M$, ce qui est très peu en ces temps-ci) d'avoir oser utiliser des practicals effects (effets de plateaux) pour les créatures, comme à l'époque bénie des 80's et de The Thing.
The Thing justement. On y pense plus (l'hommage un poil maladroit avec les Alpagas conglomérés en un gros tas de chairs palpitantes) ou moins (Theresa/Jack-Spider), à peine parasité par un chat en CGI assez vilain.
Donc, mention très bien pour le duo McGregor Allen (scupteur et design creatures) et Rita Anjos (Maquillage et Prosthèse).


La photo de Steve Annis est plutôt chouette d'ailleurs et le format 2.35 est très bien exploité par l'ami Stanley; le tout illustré par une B.O de Colin Stetson plutôt efficace.


Bref, pour tout avouer, ce fut une excellente surprise (je ne m'attendais à pas grand chose, en fait) et j'attends de pieds ferme la nouvelle adaptation de The Dunwich Horror par Stanley.


Des petits films sans prétention, sans CGI envahissant et sans cynisme mercantile, ça fait beaucoup de bien.
De plus, Stanley est un vrai artiste et il mérite mieux que ce que j'en ai lu il y a peu...ici même...


Reservoir by Colin Stetson
https://www.youtube.com/watch?v=RGaNaHg6O8U&list=PLfzW_wEeYxk46Lk_0JDVmM2mFlyJbqY5F&index=13

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le 23 juin 2020

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The Lizard King

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