La Course au Jouet avait tout pour devenir un hit, mais les enfants de l’époque lui auront préféré les parties de basket entre Michael Jordan et Bugs Bunny (Space Jam). Ce n’est qu’avec le temps et à mesure de ses rediffusions annuels que le film de Brian Levant aura obtenu ses galons d’œuvre culte. De là à dire que Schwarzenegger était un héros d’un autre temps, il n’y a qu’une décennie que l’auteur de ces lignes ne remontera pas. Le futur gouverneur de la Californie abordait depuis quelques années déjà une nouvelle étape dans sa carrière, profitant de son physique hors du commun et de ses facéties pour se tourner vers le registre de la comédie testostéroné (True Lies, Last Action Hero, Un Flic à la Maternelle).


En effet, le chêne autrichien n’a jamais eu besoin de bander ses muscles pour briller devant une caméra. Son charisme naturel, ses expressions, ses mimiques et son pouvoir d’autodérision le font pour lui. Paul Verhoeven, le hollandais violent l’avait parfaitement saisi dès 1990 en faisant du comédien un punching-ball humain (Total Recall). Brian Levant a donc pris le pied de ses contemporains afin de faire subir à son interprète une série de croches-pattes, de coup de poing et de pied dans la douleur, l’hystérie et l’allégresse communicative. Il est de notoriété que le plaisir suscité par cette comédie satirique tient en grande partie à ce degré médian de violence et de transgression, reflétant le consumérisme d’une société aveuglé par la frénésie dépensière des festivités.


Le film s’inspire d’un authentique fait divers, à une époque où les Etats-Unis étaient pris dans la folie des « Cabbage Patch » : des poupons ridiculement affreux que tentaient de s’accaparer les parents pour leurs bambins en s’affrontant à la batte de baseball dans les magasins. Vous me direz, ce n’est pas plus ridicule que de s’entre-tuer au Black Friday pour du Nutella, n’est-ce pas les cassos ? L’intrigue s’intéresse à la quête d’un père absentéiste, lancé dans une course contre la montre (et contre tout le monde) pour récupérer le dernier action-man en vogue, afin de palier au manquement de ses devoirs conjugaux. Après tout, les promesses n’engagent que ceux qui y croient.


Il convient néanmoins de tempérer les ardeurs analytiques des journalistes fustigeant les états de service du patriarche. En effet, l’inactivité professionnelle de sa femme conditionne ses absences répétées (il faut bien veiller au grain pour payer le train vie de la famille). De plus, il lui faut supporter les rébarbatives séances de judo de son fils qui ne casserai pas trois pattes à un connard, ainsi que la présence envahissante d’un voisin prenant soin de son entourage, de sa maison, de son sapin et même de sa femme… (Hé dit, tu voudrais pas la baiser tant que tu y es ? Ce serait gentil). Il est clair que Schwarzenegger n’a pas le bon rôle dans cette affaire, alors qu’il doit passer sa seule journée de repos à se coltiner l’achat d’une figurine de plastique au milieu d’une foule rendu hystérique par une rupture de stock probablement intentionnelle (Coucou Sony). Ajoutez à cela une armée de flics, de power rangers et de pères Noëls criminels en colère, un postier terroriste, une plainte pour maltraitance animale, ainsi que des vendeurs mesquins qui vous narguent continuellement et vous obtenez 107 kilos de frustration, de rancœur et d’amertume à balancer dans les couilles d’un lutin afro-américain.

La Course au Jouet reste néanmoins un divertissement à portée familiale, impliquant des niaiseries à l’eau de rose, et une réconciliation sous le sapin. A cette fin, jamais son réalisateur ne franchira la ligne de démarcation, évitant toutes considérations perverses et amorales (y compris, le vol et le trafic interlope). Seules les vierges les plus offusqués pourront éventuellement lui reprocher sa maltraitance animale (le combat de catch particulièrement fendard contre un renne). Bien que certaines blagues ambiguë ne seront compris que des adultes (le voisin aspergé de lait sur le visage clamant un « Je n’imaginais pas que ça se finirait comme ça »), le film de Brian Levant ne peut s’empêcher d’édifier une morale pontifiante sur l’importance de ne jamais négliger ses enfants ou sa femme sous peine de voir son voisin le faire pour vous.


En cette période de festivités où il convient de se réunir en famille, d'ouvrir les cadeaux et de déguster une bonne pintade fourrée. L’Écran Barge vous propose de déterrer la hache de guerre en pervertissant l'esprit de Noël. Cette sélection de films saisonniers accompagnés de critiques virulentes et acerbes est donc réservés aux viandards, aux bisseux, aux tueurs de masses, aux durs à cuirs, aux frustrés et à tous ceux qui ne croient plus aux bons sentiments et à la paix dans le monde depuis bien trop longtemps.


Le-Roy-du-Bis
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il y a 17 heures

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