Chaque fois que ce film est mentionné, j'ai l'impression qu'il divise férocement les gens en deux camps : ses adorateurs, et ses pires détracteurs. Si je devais rester la plus honnête possible, je dois bien avouer que des arguments solides sont présents dans les deux camps. Je me situerais néanmoins du bon côté de la balance. Peut-être parce que ce film, sous les abords d'un biopic classique, tente de faire autre chose que simplement balancer quelques faits historiques sur une personnalité ayant marqué l'Histoire - et en l'occurrence pas qu'un peu. On pourrait largement critiquer le point de vue intimiste de sa réalisatrice, visiblement déterminée à en faire un film éminemment féministe, mais qui pourtant tient la dragée haute à la gent masculine. Peut-être comme M.T. elle-même.
Et c'est peut-être d'ailleurs bien ce qui me plaît tant chez cette bonne femme. Fière d'être Elle, à l'aise uniquement parmi les Eux. Terriblement seule au beau milieu de cette marée masculine et politique, touchante et terrible, cruelle et intransigeante, impitoyable mais d'une intelligence et d'un sens pratique tout Britannique, qui ne pouvait que plaire à ceux qui l'ont porté aux nues. Certes, Thatcher est loin d'être exempte de tout défaut, et cela, The Iron Lady ne cherche pas à le cacher derrière ses éclats de rhétorique redoutables. Épouse égoïste, mère quasi-absente, mais telle était son ambition, jamais dissimulée. De la même manière que le long-métrage s'assume, et mêle à ce parcours unique le sous-texte du deuil. Je le vois comme la ferme volonté de réhumaniser une femme qui s'est souvent vue piétiner, et l'est encore à ce jour, pour son soi-disant manque de sensibilité. Mais le Premier Ministre britannique était convaincue : il faut agir et penser, plutôt que se contenter de sentir et de se cacher.
La performance de Meryl Streep n'est plus à saluer. À ce stade, ce n'est même plus drôle, tant l'actrice nous a habitué à la polyvalence de son talent. Les apparitions d'Harry Lloyd en jeune mari Thatcher est une bulle de fraîcheur et de ravissement, quant à Iain Glen, son rôle crucial de père guide et humble leader politique est aussi précieux que nécessaire pour comprendre une partie des enjeux de ce personnage étonnant, et si jeune impliquée dans la vie politique de son pays.
Quant à la BO de Thomas Newmann, si je reste persuadée qu'il aurait pu mieux faire - d'où mon premier jugement sévère pour ses compositions - j'ai finalement augmenté sa note de deux points, car je vois difficilement comment il aurait pu donner des notes plus épiques à ce qui n'est, pourtant, qu'un biopic traditionnel aux scènes d'action limitées (loin d'autres productions qui le virent plus inspiré, telle que Skyfall). Certains morceaux marquent de par leur grandeur et prestance, collant parfaitement à l'ascension lente mais inexorable de Thatcher, que j'ai finalement bien du mal à détester.
Est-ce que ce film était nécessaire ? Probablement pas.
Est-ce que je l'apprécie suffisamment pour avoir eu envie de le revoir ? Clairement, oui.
Œuvre étrange et hybride, mais pas moins plaisante, l'hommage rendu à la Dame de fer est loin d'être démérité.