17 avril 1975, Phnom Penh, la capitale cambodgienne sombre dans le chaos. Un pont aérien sans précédent rapatrie des dizaines de milliers de ressortissants étrangers, laissant un pays livré à lui-même dans ce qui allait devenir un des pires génocides du XXème siècle. En cause, la contagion du conflit vietnamien débordant bien au-delà de ses frontières provoquant par là même, la montée en puissance du mouvement militaire et politique appelé : Khmers rouges. Durant plus de 2h20’, Rolland Joffé («Mission»), cinéaste britannique, à travers les yeux du correspondant de guerre pour le New York Times, Sydney Schanberg (Sam Waterston) et ceux de son interprète cambodgien Dith Pran (Haing S.Ngor), va nous dévoiler les rouages d’une sanglante dictature dont la folie identitaire entrainera toute une nation vers l’horreur. Abandonné par l’Occident coupable d’une politique extérieure calamiteuse (les gouvernements américains de l’époque y sont pointés du doigt), seules une poignée de journalistes idéalistes et parfois inconscients relayent encore au péril de leur vie les informations de ce petit pays tombant dans l’oubli. Dans une première partie de film, Roland Joffé, dans un souci de réalisme, donnera une patine quasi-documentaire à son long-métrage grâce à des images d’archives poignantes et une reconstitution incroyable du contexte de l’époque. Après le départ des Occidentaux, notamment des journalistes, Joffé dans une deuxième partie absolument glaçante, va recadrer son récit sur Dith Pran, (la représentation du martyre cambodgien), prisonnier des camps de réhabilitation qui donneront leur nom au titre original du film : «Killing fields». Au-delà de la barbarie, «La déchirure» à travers la solide amitié voire la quasi-fraternité entre Sydney et Dith Pran rend un vibrant hommage à un journalisme d’investigation désintéressé dont le leitmotiv est l’humain avec un grand H.