Il y a de quoi être partagé à la vision de La déesse des mouches à feu. Du côté négatif, ce récit d'apprentissage, cette jeunesse intense dans le Québec des années 90, a des airs de déjà vu au cinéma qui n'en finit pas de scruter l'adolescence, parfois de manière sombre, ce qui est le cas du film de Anaïs Barbeau-Lavalette, mais sans nulle trace de moralisation face aux dérives des protagonistes, qui trouvent dans la drogue un dérivatif à une vie morne, où les adultes donnent un assez piteux exemple. Le côté répétitif de La déesse des mouches à feu peut agacer, la réalisatrice ayant choisi de vraiment se mettre dans les pas dans sa jeune héroïne, incarnée par Kelly Depeault, très impressionnante. Du côté positif, force est de reconnaître un vrai style au film; même si certains effets poétiques semblent un peu forcés, tout comme l'utilisation assez systématique de musique pour un grand nombre de scènes (plutôt bonne, il faut l'avouer, entre Portishead, Vivaldi et une réinterprétation de Voyage, voyage, décidément à la mode, après Compartiment N°6). Le film est très centré sur son sujet, presque de manière obsessionnelle, ce qui lui donne un sentiment d'enfermement recherché mais, à l'opposé, ne l'incite pas à tracer des lignes de fuite, si ce n'est oniriques ou hallucinées, en cherchant ne serait-ce qu'une piste narrative supplémentaire (celle des parents de l'héroïne est bâclée et évite de peu le cliché).