Suite du cycle « pizza, bière, Jésus », après le Pasolini et Jesus Christ Superstar. Cette fois, on fait un pas de côté puisque le film de Scorcese est moins l’adaptation du Nouveau Testament que du roman La Dernière Tentation de Kazantzakis (1955). Fiction donc ? Oui, bon. On va pas rentrer dans le débat du caractère fictionnel ou véridique de la Bible …


Jésus est un jeune homme hanté par la peur et rongé par le péché. Son pote Judas le secoue et le pousse à sortir de sa psychose. Après un séjour dans le désert, c’est la révélation. Il est l’envoyé de Dieu. Il va rassembler autour de lui des disciples et prêcher la parole divine. La suite, on la connaît. Vraiment ? Et la suite de la suite alors ? Il se passe quoi après sa mort sur la croix ? Se passe-t-il réellement quelque chose d’ailleurs ?


C’est un fervent catholique qui signe ce questionnement. Le plus fervent des croyants peut-il n’être qu’un vulgaire pécheur agitateur de foule ? Jésus croyait-il en lui-même ? S’est-il fait lui-même ou a-t-il été fait par d’autres. Le rôle du martyr était-il un sacrifice ou une libération ? Tout le film nous montre ce gars en souffrance qui se révèle à lui-même plus qu’aux autres, sous la houlette d’un mentor dont les motivations semblent plus politiques que spirituelles. Et Satan dans l’histoire ? Est-il en chacun ? Si oui, pourrait-il en être de même de Dieu ? On le voit, le questionnement porte moins sur le pouvoir de la foi que sur celui du sentiment de culpabilité. Tourné au Maroc, le film présente une ambiance différente de celle des deux premiers films du cycle (si tant est qu’ils puissent faire l’objet d’une comparaison). L’interprétation est habitée et de qualité, mais ces têtes connues nuisent à l’incarnation de ces personnages-icône, par nature intemporels. Il est toujours intéressant de revoir les mêmes rebondissements racontés autrement mais à cette heure, c’est encore la sobriété de Pasolini ou la folie de Jewison que je préfère. En revanche, on appréciera beaucoup la mise en perspective offerte par la représentation de la lutte intérieure du Christ, incarnée par un ange ou un démon ambivalent. Ce combat offre une véritable nouveauté. À la mise en scène, l’emphase ne concernera que les climax, le reste misant davantage sur la sobriété.


Bref ? Un récit intéressant et un regard novateur qui aiguise la curiosité. Un peu long, le film aurait probablement pu se départir d’une petite demi-heure.


>>> La scène qu’on retiendra ? Le dialogue post-mortem entre Judas et Jésus, révélateur de toutes les attentes insatisfaites et de toute la culpabilité insolvable des uns et des autres.

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le 6 avr. 2025

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