Il y a Mohamed Sifaoui au scénario, voilà.....

Après avoir vu son dernier film Fatima, l'envie de plonger dans les précédentes réalisations de Philippe Faucon se fait ressentir. Avec son sujet d'actualité, La Désintégration attire mon attention. On retrouve le même style froid et épuré, oscillant entre le cinéma et documentaire. Mais le film se révèle trop simple, surtout si on s'intéresse un minimum à ce sujet.


Dans une cité Lilloise, Djamel (Yassine Azouz) recrute des jeunes en perte de repères, pour en faire des terroristes. Ali (Rashid Debbouze) est l'un d'eux, il galère pour trouver un stage et commence à baisser les bras, face à un pays qui ne semble pas vouloir de lui.


L'absence de complexité pénalise le film. En voulant faire au plus simple, Philippe Faucon oublie de dresser le portrait de ses personnages. Il prend Ali (Rashid Debbouze) et l'emmène d'un point A à un point B, sans remettre une seule fois en question son choix. Ali ne se remet jamais en cause, il est comme son réalisateur et surtout son scénariste. C'est là que le bât blesse violemment et explique en parti la rigidité de l'ensemble. Philippe Faucon s'est associé avec Mohamed Sifaoui, un journaliste mythomane et islamophobe. Le long-métrage ne pouvait pas avoir de profondeur avec sa présence, même si c'est écrit à quatre mains, on peut lui incomber en partie son manque de constance.
Ali se radicalise, son grand frère Kamel Laadaili est en couple avec une "française" et sa soeur Keltoume El Hanafi ne porte pas le voile et ne parle pas leur langue. Sa mère Zahra Addioui porte le voile, fait des ménages et ne veut pas s'exprimer en français, alors que son père Habib Bejaoui est hospitalisé. On remarque l'absence de jeune couple musulman et français, comme si c'était impossible en France, que le destin de chacun est soit de s'intégrer en étant avec une personne dit française (blanche pour être clair), ou de finir terroriste. S'il n'y a pas "intégration", il y a forcément désintégration. Ce raccourci est suspect, comme de ne pas dire qu'être un couple musulman et donc une famille, est possible dans ce pays. Il y a un parti pris, que j'impute à Mohamed Sifaoui, où il laisse libre cours à son fantasme de l'arabe terroriste vivant dans les cités (non, pas dans un pavillon, il est forcément dans une cité...). Il oublie de dire qu'il est né en France et donc français, même s'il souligne le fait qu'il a fait des études. Cet angle-là me dérange, c'est insinuer sournoisement que les musulmans ne peuvent vivre en France, que s'ils s'intègrent et donc adoptent les coutumes de la France....L'intégration, ce mot n'a pas de sens, comme le message nauséabond qu'envoie ce film. A travers ce film, Mohamed Sifaoui a trouvé un nouveau moyen de propager ses propos. Pour vous faire une idée du personnage, c'est comme si Eric Zemmour était au scénario. Cela serait certainement plus direct et moins subtil.


C'est étonnant de la part de Philippe Faucon, de s'être fait manipulé comme Ali. Mais comme Djamel, Mohamed Sifaoui a peut-être un charisme magnétique, qu'on ne voit pas à l'écran, apparemment....D'ailleurs, Djamel a une légère ressemblance avec Tariq Ramadan, mais je ne vais pas trop m'attarder dessus, sinon on va croire que je suis paranoïaque, mais bon.....Pareil avec Rashid Debbouze qui a ressemble à Djamel Debbouze...bon ok, le nom de famille tue un peu ma lamentable tentative pour appuyer mon propos précédent.
Le film est à charge, il n'explique rien, ne fais preuve d'aucune psychologie, ni complexité. La France nourrit en son sein des terroristes en puissance et la police est impuissante. Le film date de 2012, il est annonciateur des attentats qui ont frappé le pays et même si l'imam prêche la bonne parole, il apparaît à peine. Il n'y a pas de contre-poids conséquent à la radicalisation d'Ali. On assistera même pas à son confrontation avec son frère. Les scénaristes n'avaient-ils pas les mots, où ils avaient comme leur personnage, choisi de baisser les bras ?
La ressemblance entre la manipulation d'Ali et celle de Philippe Faucon est troublante. Ce mimétisme est gênant, les deux sont censés avoir acquis des connaissances leur permettant de faire preuve de réflexion, mais que cela soit à l'écran ou à l'écriture, elle a disparu. Ce choix rend le film nauséabond et remet en question son envie de montrer "une réalité". Le FN et les islamophobes, pourraient s'approprier cette histoire pour appuyer leurs fantasmes. Bien sur, on ne peut nier que des extrémistes vivent en France et peuvent frapper à tout moment, mais ne pas montrer un autre visage, c'est comme faire un débat avec Marine Le Pen avec un mur en face d'elle. Elle peut exposer ses vérités, sans être mise à défaut. Cela résume le film, à cause de son parti pris de stigmatiser les musulmans, en n'oubliant pas de montrer qu'ils endoctrinent aussi les "vrais français", c'est le mal!
C'est dangereux de laisser des personnes comme Mohamed Sifaoui avoir une tribune trop large dans les médias. On peut l'assimiler à un terroriste, ses armes sont les mots et ils peuvent faire plus de dégâts, que des balles.


Un film qui stigmatise une population et n'offre rien en matière de réflexion. Philippe Faucon fait preuve d'une simplicité malvenue, on aurait pu lui faire un procès d'intention, mais son parcours semble démontrer que c'est une erreur de parcours. Il a le bénéfice du doute, mais il faudra éviter de mal s'entourer.

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le 8 nov. 2015

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Laurent Doe

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