"Marcello... Come here !"
"La Dolce vita" est une œuvre majeure, non seulement de Federico Fellini, mais aussi du cinéma italien et même mondial.
Véritable manifeste de ce que sera désormais le cinéma de Fellini ("baroque" est le qualificatif qui revient le plus souvent), ce film très novateur a dérouté autant que séduit lorsque, en 1960, il fut présenté au festival de Cannes.
A cette époque, les films avoisinant les 3 heures étaient encore rares. Circonstance "aggravante" (si l'on peut dire), la structure narrative apparemment disloquée de "La Dolce vita" peut rebuter au premier abord : l'action s'étire, parfois très longtemps ; on a l'impression de voir un autre film à l'intérieur du film (toute la séquence autour du "miracle", par exemple) ; on suit l'adorable Anita Ekberg dans ses pérégrinations nocturnes... Au final, le fond rejoint en réalité la forme : à cette abondance (voire surabondance) de scènes qui s'emboîtent les unes dans les autres, telles des poupées russes, de personnages pour la plupart hauts en couleurs, de séquences, de musiques, répond l'abondance que "La Dolce vita" entend montrer : celle d'une société romaine (mais ce pourrait tout aussi bien être la société de consommation tout court) oisive, plutôt argentée, cynique, arrogante, mais aussi touchante.
Ce n'est pas un hasard si Fellini avait songé, un temps, appeler son film "Babylone 2000 ans après J.C." : il y a de la décadence dans "La Dolce vita", une décadence cyclique et séculaire, voire millénaire. Cette même décadence dépeinte dans "Satyricon" (1968). Cette même décadence ouvertement assumée dans "La Dolce vita", si ouvertement assumée qu'elle déplut fortement à l'église catholique, qui condamna sans appel ce qu'elle considéra comme un vulgaire hymne à la débauche... La réponse de Fellini, cinglante et réjouissante, arrivera deux ans plus tard, sous la forme du délicieux sketch qu'il réalisa pour le film collectif "Boccaccio '70" ("Boccace 70", en 1962) : "Le Tentazioni del Dottor Antonio".