Emmanuel Finkiel a décidé, et c’est une certaine forme de courage, d’adapter le roman de Marguerite Duras. Mais au vu du résultat, cela confirme que tous les romans ne passent pas forcément aisément de la page à l’écran. D’ailleurs on ressent énormément la base littéraire de cette œuvre dans cette transcription cinématographique. La voix off, fort présente, traduit le ressenti de l’écrivaine dans de longs monologues très écrits pour pallier à ce que les images ne peuvent pas forcément exprimer. Par la même nous vient une question : était-il nécessaire et judicieux d’en réaliser l’adaptation ? On serait tenté de répondre par la négative bien que Finkiel parvienne par bribes à retranscrire magnifiquement certains passages du livre et s’affranchisse de cette barrière littéraire.
Le principal atout de « La Douleur » version cinéma est sans conteste le choix de Mélanie Thiery pour incarner cette grande dame de la littérature française. Sans essayer de singer à tout prix le modèle, elle interpréte cette femme avec une ferveur indubitable et une force dramatique impressionnante. Grâce à elle, on ressent parfaitement ce qu’ont du endurer bon nombre de femmes durant l’après-guerre. Elle est bouleversante, notamment dans une scène finale qui déchire le cœur et prouve qu’il y a tout de même du bon dans cette œuvre. De la même manière, une séquence au restaurant avec Benôît Magimel est tout à fait exemplaire, dès lors que la polarité de leur relation s’inverse et que le personnage Thiéry reprend le dessus. Finkiel a su diriger parfaitement ses acteurs et sur ce versant c’est un sans faute. Mais durant les deux heures de ce long-métrage, qui semblent avouons-le parfois interminables, on a envie de dire qu’il aurait pu s’appeler « L’attente » voire « L’ennui ».
En effet, c’est beaucoup trop long, redondant et monotone. Mais peut-être que ces sentiments éprouvés par le spectateur étaient le but du metteur en scène pour nous faire comprendre et intégrer cette douleur et cette horrible attente vécues par les proches des déportés. L’emballement critique dont le film fait l’objet est cependant à prendre avec des pincette . Comme si pour le gotha de la presse cinéma parisienne, tous les films intégrant ces sujets hautement abrasifs et sacrés que sont les camps de concentration, la Shoah et la déportation ne pouvaient qu’être bons et salués. Ceci mis de côté, on assiste donc à de nombreuses scènes d’attentes - donc de langueur - plutôt répétitives et parfois coupées par une sonnerie de téléphone ou quelqu’un frappant à la porte de l’appartement de Duras. Tout cela enrobé dans une musique de film d’auteur caricaturale, constituée de flûtes et de violents stridents, profondément agaçante. Il est donc clair qu’hormis quelques effets de mise en scène réussis, comme lorsque le personnage se dédouble et se voit attendre, cette adaptation au visuel sombre et terne est davantage soporifique que passionnante.
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