"La Femme du lac" ou "La Possédée du lac" selon les versions. Le premier titre, traduction littérale de "La donna del lago", est à privilégier quand le second nous laisserait penser avoir affaire à un film fantastique, ce qui n'est pas le cas. Attention aux fausses pistes. Mais à quel genre de curiosité sommes-nous alors confrontés ici ? À une ébauche de giallo romantique, baigant en permanence dans les brumes d'hiver d'un bord de lac isolé, comme ignoré par la vie. Le temps semble figé mais a-t-il déjà seulement existé dans cette contrée perdue ? Le héros de notre histoire, Bernard, avouera croire en avoir perdu la notion.
Mais reprenons : tout d'abord, un hôtel du nord de l'Italie sans clients dans lequel un romancier sans inspiration vient s'installer en pleine morte-saison dans l'espoir d'y retrouver une femme autrefois non pas aimée, simplement admirée, rêvée. Cette femme, il ne la reverra jamais ; elle est morte, suicidée, lui apprendra-t-on. Point de départ d'une enquête jalonnée de personnages troublants, déréglée par la fièvre et le froid, lardée de cauchemars se confondant avec le réel, le présent. Point de départ d'une enquête toutefois relativement mince, privilégiant une atmosphère énigmatique à trop de rebondissements. Car c'est bien ça "La Femme du lac" : une ambiance, une présence ; l'obssession d'un souvenir ou d'un fantasme évaporé, d'une disparition obscurcie par le soupçon. Avec une telle matière, la tentation du fantastique aurait été grande mais, comme déjà révélé plus haut, notre duo de réalisateurs (dont Luigi Bazzoni qui sera quelques années plus tard seul aux commandes du très bon giallo pur sucre "Journée noire pour un Bélier") n'y succombe jamais, préférant se déporter à l'occasion de quelques scènes-clés sur le terrain des expériences visuelles pouvant rappeler le cinéma d'art et d'essai. Ces moments restent très ponctuels et s'ajoutent à un travail sonore dominé par l'omniprésence d'un vent discret mais constant, forcément inquiétant. En résulte donc l'adaptation d'un roman policier modelant avec grand soin son mystère mais d'apparence globalement un peu âpre. Un travail rigoureux au service d'un climat vaporeux.