Vol de vie
Cette critique est avant tout adressée aux spectateurs qui ne connaissent pas Lav Diaz et qui hésiteraient à se lancer dans son cinéma. Il s'agit de montrer en quoi La femme qui est partie est une...
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le 12 févr. 2017
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Les productions de Lav Diaz ont beau être toujours hypertrophiques sur le papier, il nous installe dans un temps qui fait qu'on ne voit néanmoins pas passer ce temps et qu'on ne parvient pas à s'y ennuyer. Car ce temps est absorbé par une image d'une incroyable pureté et par des moments qui captent le spectateur et le substitue à son temps propre. A tel point que je n'ai jamais vu quelqu'un quitter la salle pour un film de Lav Diaz. La femme qui est partie ne raconte pas un départ mais le "avant" un départ et les motivations sont dévoilées peu à peu, à la faveur de dialogues et de scènes quotidiennes aux philippines.
La seconde partie du film se déroule complètement dans la nuit, une longue nuit interminable sans lever de soleil, qu'on cesse d'ailleurs d'attendre pour s'ancrer dans une atmosphère sans secours et impitoyable pour les plus démunis. Seule cette femme vient apporter sa lumière pour séjourner auprès d'eux. Elle ne part qu'à la fin du long métrage (presque quatre heures). Ces quatre heures n'ont rien d'une cérémonie d'adieu ou de préparatifs de voyage, pas même d'un temps de latence ; ce sont des vies qui se rencontrent, des conjectures qui racontent des tourments à la fois singuliers et universels se rejoignant par le hasard. Comme à son habitude, c'est l'affliction de quelques individus "hors-norme" et la complexité de la morale pour de tels êtres vivant en amont du monde, dissimulés dans la brèche du temps. Il y a, dans les films de Diaz, le désir exprimé de vivre avec ses blessures et même depuis elles parce que c'est là seulement que le sens d'une vie peut se former et que des valeurs peuvent surgir. Chez le réalisateur, la bonté est toujours corrélée à une rage destructrice dénotant d'un grand sens du tragique. C'est pourquoi elle est toujours montrée dans son caractère fragile et précaire.
Les scènes sont souvent hypnotiques et transcendantes par ce sens qui se forme dans une déhiscence qui est celle de l'image-temps : le temps sort de ses gonds et voir un film de Diaz, c'est précisément sortir du temps pour entrer complètement dans l'image et le sens qui s'y forge. L'histoire prend sens dans le temps de l'image, par l'arrêt qui fait naître un univers avec ce que cela suppose : de la création et de la vie. Il y a ainsi dans chacun de ces films le pressentiment d'un renversement du temps linéaire en temps cyclique et même d'une eschatologie. De te fabula narratur...
Créée
le 18 févr. 2017
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