Il y a quelques jours j'ai envoyé à 2-3 personnes mon top 5 films 2023. Je pourrais presque le modifier, car j'ai pris beaucoup de plaisir devant ce film. Il ne suit pas un ordre narratif classique, ce qui n'est pas pour me déplaire (Tarantino est mon réalisateur préféré). Ce qui devrait être le coeur du film, la disparition volontaire de la mère, Valérie, interprétée par Mercedes Dassy de Rosa (Celeste Brunnquell), est d'abord le thème de l'introduction, puis relégué au second plan pendant l'essentiel du film, puis revient au centre de l'intrigue dans la dernière partie du film, dans une sorte de séquence de folie du personnage principal, le père Etienne, interprété par Nahuel Perez Biscayart. Ce qui fait la force de ce film, c'est d'avoir le courage d'un choix esthétique fort: le fait d'expérimenter dans de nombreux plans du film sera plus important que le scénario.


La relation entre le père et sa fille est touchante, comme semble l'annoncer le titre de ce film, sauf que ce n'est pas convenu pour autant. Première force de cette relation (et des relations entre les autres personnages dans une moindre mesure d'ailleurs): les dialogues sont très bien écrits. Le scénariste, Erwan Le Duc, également réalisateur du film, maitrise l'art de la réplique. Un exemple parmi d'autres (basé sur mes souvenirs haha):

- Etienne (rentrant à la maison): "Bonsoir! Rosa? Rosa?"

- Rosa: "Oui?"

- Etienne: "Qu'est-ce que tu fais?"

- Rosa: "Je peins."

- Etienne: "Ca fait longtemps que t'es-là?"

- Rosa: "Dix-sept ans (elle a 17-18 ans)."

Si je veux pinailler (et c'est pour ça que je mets 7,5 et pas 8), Le Duc abuse un tout petit peu de son art des dialogues. Je pense qu'il y a une ou deux scènes dans le film où le film s'écoute un peu trop parler (pour revenir à Tarantino, on peut faire un parallèle ici avec Les 8 salopards, super film par ailleurs).


J'ai bien aimé une scène d'un petit-déjeuner dans la cuisine familiale. On a ici une attention accordée à la matérialité et un certain réalisme (même si j'aime pas trop ce mot), qu'un certain cinéma bourgeois aseptisé occulte (dans The Fabelmans par exemple, qui est censé nous montrer l'artisanat du cinéma, je trouve que la matérialité des choses on la ressent pas). Quand je vois Céleste Brunnquell manger des céréales, c'est la première fois que je m'identifie à cette action (les bruits de bouche quand elle croque dans les céréales, les bruits de la cuillère qui tape contre le bol, le bruit que fait le bol quand on le repose sur la table). La tablette de chocolat sortie de son premier emballage, avec juste encore l'aluminium autour et posée de travers sur la table, c'est quelque chose qu'on voit jamais au cinéma, sûrement parce que beaucoup de chefs décorateurs auraient hurlé et trouvé ça non esthétique. Mais c'est ça ma table chez moi.


Enfin, en tant que passionné de foot, ça me fait plaisir d'avoir enfin une fiction française qui traite de foot et qui est véritablement de qualité (avant je devais me contenter de Les seigneurs, pas un mauvais film mais un cran en-dessous de celui-ci). Les séquences où Etienne entraine son équipe de football, bien que quelque peu ridicules sur certains aspects car ses joueurs ne semblent pas trop l'écouter, font écho chez le fan de foot que je suis, et ça me renforce dans mon envie d'entrainer une équipe de foot l'année prochaine.

Créée

le 4 janv. 2024

Critique lue 33 fois

Vincent Engel

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